Évaluer la douance : pratiques actuelles et aspirations des psychologues et neuropsychologues au Québec

Abstract

De nombreux modèles théoriques peuvent guider l’évaluation de la douance ce qui, en l’absence de lignes directrices au Québec, donne beaucoup de latitude aux pratiques. Nous nous sommes intéressés à comment les psychologues du Québec évaluent la douance, aux raisonnements soutenant leurs choix, ainsi qu’à leurs souhaits pour l’avenir du domaine. Une enquête (n = 71) et des entrevues semi-dirigées (n = 6) ont été réalisées auprès de membres de l’Ordre des psychologues du Québec puis traduits respectivement en statistiques descriptives et en théorie enracinée. Il en ressort que l’objectif le plus courant pour les évaluations est d’expliquer un fonctionnement différent des autres. Pour plusieurs, l’évaluation oriente les adaptations à mettre en place ou est l’occasion d’identifier une double exceptionnalité, mais ne serait pas indiquée lorsque tout va bien. Leurs définitions de la douance invoquent les concepts d’intelligence, d’exceptionnalité et de différence. Plus de la moitié des psychologues n’utilisent cependant pas de modèle spécifique. Beaucoup de variabilité est observée dans les modèles adoptés (Renzulli est le plus populaire) et ce qui est recherché au sein du profil. Les sources d’information varient, mais les tests psychométriques et les entrevues font l’unanimité. Une majorité utilise un seuil critique de deux écarts-types. Le biais positif pour les garçons ne semble pas présent, mais un biais positif pour les personnes doublement exceptionnelles est révélé. Les conséquences des faux-positifs sont discutées, ainsi que les pistes pour l’avenir de la pratique. Cette étude pourra guider les choix des instances décisionnelles concernant l’évaluation de la douance.

A high number of theoretical models can guide giftedness assessment which, in the absence of guidelines in Quebec, gives a lot of latitude to practices. We are interested in how Quebec psychologists assess giftedness, as well as the reasoning behind their choices and their wishes for the future of the field. A survey (n = 71) and semi-structured interviews (n = 6) were conducted with members of the Ordre des psychologues du Québec, then translated into descriptive statistics and grounded theory, respectively. We found that the most common goal for evaluations is to explain a different way of being. For many, the assessment guides future adaptations or is the occasion to identify a twice exceptionality but would not be indicated if everything is going well. Their definitions of giftedness invoke concepts of intelligence, exceptionality, and difference. More than half of psychologists, however, do not use a specific model. A lot of variability is observed in the models adopted (Renzulli being the most popular) and what is sought within the profile. Sources of information vary, but psychometric tests and interviews are unanimously used. A majority use a cut-off of 2 standard deviations. The positive bias for boys does not appear to be present, but a positive bias for twice exceptionals is revealed. The consequences of false positives are discussed, as well as avenues for the future of the practice. This study can guide decision-making bodies in their choices regarding the assessment of giftedness.