La contribution de l’identité professionnelle à la problématique des agressions fondées sur le sexe et sur le genre dans les métiers spécialisés : une étude dans les secteurs de la construction et manufacturier au Québec
Thesis or Dissertation
2018-05 (degree granted: 2019-03-13)
Author(s)
Advisor(s)
Level
DoctoralDiscipline
Relations industriellesKeywords
- Agression fondée sur le sexe et sur le genre
- Identité professionnelle
- Secteur de la construction
- Secteur manufacturier
- Culture de métiers
- Méthode mixte
- Modèles multiniveaux
- Sex and gender-based aggression
- Professional identity
- Construction industry
- Manufacturing sector
- Skilled trades culture
- Multilevel models
- Mixed method
- Sociology - Industrial and Labor Relations / Sociologie - Travail et relations industrielles (UMI : 0629)
Abstract(s)
Cette thèse doctorale s’intéresse à mieux comprendre la contribution de l’identité professionnelle à la problématique des agressions fondées sur le sexe et sur le genre dans les métiers des secteurs de la construction et manufacturier au Québec, ainsi que le rôle médiateur des réponses agressives dans la relation entre la structure de l’identité et les agressions au travail.
L’exclusion des femmes et les agressions qu’elles subissent dans le monde professionnel sont toujours une problématique très préoccupante dans les professions à forte prédominance masculine. Toutefois, il se peut que les agressions ne soient pas uniquement orientées en fonction du sexe des victimes, mais aussi en fonction de leur genre, selon leurs masculinités et féminités. D’où l’importance d’élaborer un modèle théorique sur les agressions fondées sur le sexe et sur le genre, en élargissant cette problématique à toutes les personnes, peu importe leur sexe, afin de comprendre comment le genre des travailleurs peut influencer les agressions au travail.
Une limitation importante dans la littérature consiste en l’omission de l’identité professionnelle. L’identité professionnelle englobe l’ensemble des pratiques et des coutumes qui attribue une reconnaissance aux travailleurs dans l’exécution de leurs tâches, en plus d’une affirmation d’eux-mêmes dans la sphère du travail (Ashforth & Mael, 1989). Suivant le modèle théorique de cette thèse, l’identité professionnelle se construit par l’histoire des groupes culturels des métiers, composée des institutions et des valeurs, ainsi que par des modèles culturels d’identité professionnelle, soit les stratégies identitaires des travailleurs qui en résultent (stratégies identitaires de solidarité démocratique, fusionnelle, d’affiliation et de retrait). Ces modèles d’identité au travail de Sainsaulieu, basés sur le conditionnement des rapports sociaux au travail, permettent de bien cerner les stratégies identitaires au travail (Sainsaulieu, 2014).
Le but de cette thèse est d’établir empiriquement le rôle de l’identité professionnelle dans la problématique des agressions dans les métiers. La première hypothèse de recherche, induite par le modèle empirique, suggère que les agressions résultent d’une forte estime collective du groupe, d’un type de métier genré masculin, de même que d’une culture de métiers caractérisée par de hauts niveaux de collectivisme et de distance hiérarchique, ainsi qu’une faible intégration des différences. À ces éléments s’ajoute l’association des agressions à la fragilisation de cette identité, par une perception de menaces, par de faibles niveaux de justice interactionnelle, ainsi que par certaines conditions de l’organisation du travail. La deuxième hypothèse soutient que les réponses agressives médiatisent la relation entre la structure de l’identité et les agressions.
Sur le plan méthodologique, une étude à méthode mixte est privilégiée dans le cadre d’une collecte de données primaires. Des questionnaires ont été distribués au sein de 54 équipes, réparties dans sept chantiers de construction et dans quatre établissements manufacturiers, pour un total de 282 répondants. En complémentarité, des groupes de discussion et des entrevues individuelles ont été conduits auprès de 15 femmes œuvrant dans le milieu de la construction afin de bien distinguer les agressions fondées sur le sexe.
Les résultats de modèles de régression multiniveaux, en considérant les variations entre les 54 équipes, ont réfuté l’effet médiateur des réponses agressives, tout en suggérant les effets directs de la déviance interpersonnelle sur les agressions psychologiques. À cela, les analyses quantitatives ont permis d’associer certains aspects de l’identité professionnelle prédisposant aux agressions, notamment une faible intégration des différences dans l’équipe, ainsi qu’un soutien social insuffisant. Une utilisation des compétences plus forte et une faible préoccupation pour le groupe s’associent également aux agressions sexuelles dans les métiers. Distinctement, une faible estime publique du métier s’associe à des agressions physiques, alors que des demandes au travail élevées et de l’insécurité d’emploi s’associent à des agressions psychologiques. De plus, les données qualitatives enrichissent l’interprétation des résultats en mettant en lumière le rôle central des masculinités, surtout la valorisation de la force physique et de l’affirmation de soi dans les métiers, pouvant justifier les agressions fondées sur le sexe et sur le genre. Enfin, les modèles multiniveaux ont associé le fait d’être une femme aux agressions physiques et sexuelles, de même que la masculinité chez les travailleurs s’associe à l’adoption de réponses agressives. Les conclusions de cette thèse corroborent l’importance d’agir sur les dimensions identitaires afin de réduire les agressions, particulièrement en misant sur l’inclusion des travailleurs dans les processus innovants, et sur une plus grande ouverture de leur part en égard aux nouvelles idées. Au niveau de la culture de métiers, il s’avère judicieux de privilégier les valeurs dites plus féminines basées sur la collaboration, l’empathie et le soutien lors de moments de vulnérabilité. This PhD thesis explores how professional identity impacts sex and gender-related aggressions in the skilled trades, focusing on the construction and manufacturing sectors in Quebec. It also aims to provide insights on how these aggressive responses play a mediating role in shaping the professional identities of these workers.
The exposure of women to exclusion and aggressions in the professional world are a huge concern, particularly in male dominated occupations. However, it is possible that these aggressive responses are not merely directed towards to the biological sex of the victims, but also directed towards female gender-based characteristics, especially those such as kindness, tenderness, empathy, and affection. The development of a theoretical model on sex and gender-based aggressions is thereby necessary. Rather than focussing on the factors that affect women’s experiences with aggressions, this thesis contributes to explaining how gender-related factors affect aggressions towards all workers, regardless of their male and female sexual characteristics.
One limitation of the current research is its neglect of professional identity, even if this concept is essential to explaining why harmful behaviours are pursued to maintain ideals shared by dominant social groups (Tajfel & Turner, 1986). Professional identity reflects a form of social recognition at work, built on prestige related to employment status and professional responsibilities (Ashforth & Mael, 1989). Professional identities are developed through the shared histories of diverse cultural groups in the skilled trades. They are formed through institutions and values associated with certain sectors of activity. This also affects the identity-related strategies that workers in trades apply in the workplace (negotiation, fusion, affinities and retreat). Sainsaulieu’s classification of occupational identities (2014) based on the conditioning of social relationships at work, helps one to identify the identity-related strategies of workers.
Empirically, this thesis examines the impact of professional identity on sex and gender-based aggressions in skilled trades. The first hypothesis associated with the model explores whether workplace aggressions in skilled trades occupations are positively related to high levels of collective self-esteem, to the trade being stereotypically male, to high degrees of collectivism within the trade, to hierarchical distance to power, and to a low level of integration of differences within the work team. Drawing from these elements, the undermining of professional identity, including perceived threats, intrapersonal justice, as well as the way working conditions are organized, could also cause workplace aggressions in skilled trades. The second hypothesis suggests that the aggressive responses mediate the relationship between professional identity and workplace aggressions in skilled trades. By using mixed methods with primary data gathering, and through the triangulation of data, it is possible to explain how each of these factors effects professional identity. Some focus groups and interviews with 15 women, and a questionnaire administered to 282 workers working on seven construction sites and four manufacturers, facilitate the interpretation of results of sex-based aggressions.
The results of multi-level regression models, addressing variations across 54 participating teams in the study, rejected that aggressive responses had a mediating affect on workplace aggressions. However, they suggest that they may have direct effects on interpersonal deviance with respect to psychological aggressions. The quantitative analyses also showed that some aspects of professional identity made individuals more disposed to workplace aggressions. These include a low integration of the differences within the team, as well as an insufficient social support at work. A higher skills utilization and a low concern for the group are also associated with sexual aggressions in skilled trades. In addition, low public skilled trades self-esteem is associated with physical aggressions, while work demands and job insecurity are associated with psychological aggressions. Furthermore, qualitative data enrich the interpretation of the results by highlighting the central role of masculinity, especially the valorisation of physical strength and assertiveness at work, which could explain sex and gender-based aggressions. Finally, multilevel models associated being a woman with physical and sexual aggressions, as well as the worker’s masculinity, are associated with the adoption of aggressive responses. This thesis concludes on the importance of taking preventive actions on identity dimensions to reduce workplace aggressions, mainly a better inclusion of all the workers and an open mind about innovation and new ideas. At the level of skilled trades culture, one issue is to incorporate feminine values based on the collaboration, empathy and the social support during moments of vulnerability.
This document disseminated on Papyrus is the exclusive property of the copyright holders and is protected by the Copyright Act (R.S.C. 1985, c. C-42). It may be used for fair dealing and non-commercial purposes, for private study or research, criticism and review as provided by law. For any other use, written authorization from the copyright holders is required.