Permalink : https://doi.org/1866/20631
L'évaluation en contexte interculturel: les processus de prise de décision des professionnelles des services de la protection de la jeunesse
Thesis or Dissertation
2017-07 (degree granted: 2018-03-21)
Author(s)
Level
DoctoralDiscipline
Service socialKeywords
- Prise de décision
- Interculturalisme
- Protection de la jeunesse
- Familles racisées
- Éthique
- Pratiques professionnelles
- Decision-making
- Interculturalism
- Child protection services
- Racialized families
- Ethics
- Professional practices
- Social Sciences - Social Work / Sciences sociales - Travail social (UMI : 0452)
Abstract(s)
Contexte : Pour les services de la protection de la jeunesse (PJ), la présence grandissante de
familles provenant d’horizons culturels diversifiés implique une rencontre avec des pratiques,
des valeurs et des normes parentales qui, parfois, diffèrent de celles utilisées par les membres
du groupe majoritaire. Malgré l’intérêt croissant pour l’arrimage des balises cliniques édictées
par les services de la PJ et les particularités de l’intervention interculturelle, peu d’études ont
porté sur les méthodes ou les processus d’intervention utilisés par les professionnelles auprès de
familles racisées. La thèse vise à comprendre les processus de prise de décision des
professionnelles des services d’évaluation en PJ auprès des familles racisées. Les objectifs
spécifiques découlent de ce contexte et visent à : a) identifier les aspects qui influencent les
processus de prise de décision des professionnelles, notamment ceux qui appartiennent à
l’organisation, à l’individu et au champ disciplinaire ; b) analyser les praxis (réflexions et
actions) qui sous-tendent les processus de prise de décision des professionnelles lors de
l’évaluation.
Cadre méthodologique : La méthodologie de la théorisation enracinée (MTE) a été privilégiée
afin de laisser émerger du discours des professionnelles les thèmes pertinents aux analyses. Les
données ont été amassées en trois vagues distinctes afin de favoriser les aller-retour entre la
cueillette de données et les analyses. Des entretiens semi-dirigés (n=18) et un entretien de
partage des connaissances en groupe ont été menés auprès de professionnelles associées aux
équipes d’évaluation dans deux centres de protection de la jeunesse de la région métropolitaine.
Résultats : Les analyses ont permis d’identifier six facteurs qui influencent les processus de
prise de décision à l’évaluation en contexte interculturel. Ces facteurs sont : 1) la pression des
échéances ; 2) les attitudes des familles racisées et des professionnelles ; 3) les différents rôles
de l’évaluation ; 4) le sentiment qu’ont exprimé les professionnelles de ne pas être préparées ;
5) les formes de maltraitance mises en cause ; 6) certaines tensions par rapport à la diversité. La
mise en relation de ces facteurs d’influence a permis théoriser la notion d’agentivité à travers les couleurs de pratique des professionnelles. L’agentivité à travers les couleurs de pratique réfère à des styles personnels dans l’intervention, à des particularités distinctives et reconnaissables d’une professionnelle dans l’exercice de son travail par rapport à des collègues
ou d’autres professionnelles ayant les mêmes responsabilités. Ultimement, cette notion clé
témoigne de l’aspect contextuel et relationnel des processus de prise de décision en contexte
interculturel.
Retombées : La compréhension des processus de prise de décision en contexte interculturel
permet de concevoir les rencontres entre les familles racisées et les professionnelles de la PJ
comme un microcosme de la société québécoise. La thèse révèle aussi l’engagement des
professionnelles dans leur relation avec les familles racisées, tout en dégageant certains enjeux
tels que le manque de contextualisation par rapport au macrosystème et la variabilité
individuelle entre les professionnelles d’une même équipe. Enfin, elle permet de réfléchir à
l’utilisation des approches anti-oppressives pour soutenir les pratiques des professionnelles de
la PJ et mieux adapter les services aux besoins des familles racisées. Context: For child protection services (CPS), the rising number of immigrant families implies
encounters with practices, values and norms that might be different from those shared by
members of the majority. Despite growing concerns about adapting social services to the
specific needs of racialized children and families, scant attention has been paid to the methods
child protection workers use with these families. This thesis looks at how caseworkers carry out
the decision-making processes with racialized families. The objectives stem from this and aim:
a) to identify the factors that influence the decision-making processes, including those that
belong to the organization, the individuals and the field and b) to analyze the praxis (reflexivity
and actions) that underlie the decision-making processes during the evaluation.
Methods: The methodology of Grounded Theory (GT) was chosen because of its capacity to let
the most pertinent themes emerge without any pre-existing theoretical framework. The data was
gathered in three different waves in order to facilitate the back and forth between data collection
and analysis. Semi-structured interviews (n=18) and a knowledge exchange forum were
conducted with caseworkers and managers affiliated with an evaluation team in youth protection
agencies from Montreal metropolitan areas.
Results: Analysis identified six factors that influence the decision-making processes in an
intercultural context: 1) time pressure, 2) the caseworkers and racialized families’ attitudes, 3)
the conflicting roles of evaluation, 4) the feeling of not being ready for the job expressed by the
caseworkers, 5) some aspects of diversity under tension and 6) the type of maltreatment at stake.
The connection of those factors supported the development of a theory about the agency via the
“shades of practice”. The agency via shades of practice refers to the individual styles, values
and preferences highlighted by caseworkers, personal features that are unique and reknown
compared with coworkers. Ultimately, the theory of agency via shades of practice shows the
contextual and relational aspects of decision-making processes within an intercultural context.
Impacts: The understanding of the decision-making processes in an intercultural context spur
to consider the encounters between racialized families and youth protection caseworkers as a
microcosm of Québec’s society. It also acknowledges the skills deployed by caseworkers while
highlighting some challenges like the lack of contextualization and the variability between
decision-making processes by caseworkers from the same team. The thesis provides support for
anti-oppressive approaches in CPS and actions to better serve racialized families.