Abstract(s)
Dans Creep show, un narrateur présente ses creeps, les malades de son entourage, des schizophrènes inadéquatement nommés, afin de les ramener à la vie par ses mots. En se souvenant de certains moments où la folie se manifestait à lui, il veut déterrer ses ensevelis, les faire parler en leur prêtant son écriture. Dans un récit morcelé pouvant évoquer une galerie de portraits en mouvement, les protagonistes sont présentés comme des monstres, des rêveurs ou des sources d’inspiration selon le moment relaté par un narrateur affecté qui se replonge littéralement dans un passé s’échelonnant entre l’enfance et l’âge de dix-huit ans. Portant autant sur la maladie mentale que sur la honte et la peur des mots, Creep show est un texte sur le silence et l’impuissance, sur l’incapacité de nommer adéquatement la folie ; il s’agit d’un court récit de dix-sept scènes encadrées par un prologue et un épilogue où l’écriture d’un traumatisme se vit comme une histoire d’amour.
L’essai intitulé “Je est des autres.” De l’esthétique borderline chez Marie-Sissi Labrèche décrit la genèse d’une esthétique « borderline ». Dans une approche à la fois psychanalytique et narratologique, fondée sur les concepts de la mélancolie, du kitsch et de la crypte, l’analyse tente de montrer quel type de construction thématique et formelle soutient cette esthétique. À partir d’éléments représentatifs de l’univers de Marie-Sissi Labrèche (la question de la limite, la pulsion de mort, le rapport au corps et l’instabilité), l’essai s’intéresse à la façon dont la narratrice de Borderline (2000) donne à lire une identité sédimentaire, un autoportrait masqué-fêlé, où « Je est [des] autre[s] ». En regard de ces éléments, l’hypothèse d’une machine textuelle fonctionnant – thématiquement et formellement – dans et par l’instabilité et l’altérité oriente la réflexion vers l’idée d’une écriture du trauma qui pourrait représenter une tentative de réappropriation identitaire passant par l’esthétique dite « borderline ».
In Creep show, the narrator presents his creeps – some family members who are schizophrenics and inadequately appointed – and revives them by its words. By remembering certain moments when the insanity showed itself to him, he wants to dig up the buried and make them speak by lending them his writing. In a split narrative, which could evoke a collection of portraits in movement, the protagonists are presented as monsters, dreamers or sources of inspiration according to the narrator who literally dives back into the past. Presenting mental illness as the shame and the fear of the words, Creep show is a novel about silence and about the importance to understand adequately the insanity; it is a short narrative of seventeen scenes where the writing of a traumatism is experienced as a love story.
The essay entitled “Je est des autres.” De l’esthétique borderline chez Marie-Sissi Labrèche describes the genesis of a “borderline” aesthetic. In a psychoanalytical and narratological approach established on the concepts of the melancholy, the kitsch and the crypt, the analysis tries to show which type of thematic and formal construction supports this aesthetic. With representative elements of the universe of Marie-Sissi Labrèche (the question of the limit, the death drive, the body obsession and the instability), the essay is interested in the way the narrator of Borderline ( 2000 ) offers a reading of the sedimentary identity and a misleading self-portrait. According to these elements of reflection, the hypothesis of a textual machine working in and by the instability (and the otherness) leads the analysis to the idea that writing the trauma could represent an attempt at reclaiming identity through the aesthetic called “borderline”.