Perception musicale et plaisir esthétique au siècle des Lumières
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Abstract(s)
Cet article interroge les fondements théoriques de l’expérience musicale chez quatre
penseurs des Lumières : Condillac, Rousseau, Chabanon, et Smith. On dégage
d’abord les opérations qui, selon Condillac, permettent au spectateur d’actualiser
les imitations visées par le musicien. Ce « régime empiriste de l’écoute » envisage
l’expérience musicale dans une dualité entre plaisirs sensibles de pure
« jouissance » et plaisirs d’imagination intellectualisés. Rousseau cherche à sortir
de ce dualisme, en fondant l’émotion musicale dans une théorie de la
communication primitive et dans une anthropologie de la pitié. L’effort de
Chabanon pour rompre avec la conception imitative de la musique s’accompagne
d’un retour du primat de la « jouissance » et d’une nouvelle forme de sensualisme
musical. Adam Smith est le premier philosophe à dégager la musique du schéma
mimétique sans renoncer à traiter l’écoute musicale comme une opération
proprement intellectuelle.