Entre cohésions et divisions : les relations entre femmes auteures en France et en Italie (1770-1840)
Thesis or Dissertation
Abstract(s)
Cette thèse documente, répertorie et analyse les relations entre les femmes auteures en France, en Italie, et entre Françaises et Italiennes, de 1770 à 1840, à partir de l’étude des correspondances et des ouvrages publiés de douze écrivaines (Anne-Marie de Beaufort d’Hautpoul, Sophie Gay, Félicité de Genlis, Marie-Émilie de Montanclos, Constance Pipelet Salm, Germaine de Staël, Teresa Bandettini, Elisabetta Caminer, Carolina Lattanzi, Diodata Saluzzo, Fortunata Sulgher Fantastici et Isabella Teotochi Albrizzi). Au cours d’une période caractérisée par le développement de l’imprimé, par l’importante participation féminine à la querelle des femmes, par le bouleversement politique international issu de la Révolution française et de l’époque napoléonienne, ainsi que par la présence affirmée des auteures, ces dernières font face à une réactivation des attaques contre l’autorat féminin. Dans ce contexte, les relations entre écrivaines illustrent le défi de « l’action commune » conçue dans une optique de défense d’une cause (celle des auteures) avant l’émergence du mouvement féministe.
Les écrivaines étant souvent présentées soit comme « sœurs, » soit comme « rivales », notre étude démontre que la nature des relations féminines est infiniment plus complexe dans les faits. D’un côté, les relations entre femmes auteures témoignent d’une certaine cohésion au sein de la communauté : les contacts sont nombreux, celles-ci s’épaulent en temps de crise, construisent des généalogies littéraires féminines, et déconstruisent les discours portant sur la soi-disant « exceptionnalité » et la « rivalité » des femmes de lettres. De l’autre côté, d’importantes divisions traversent leurs réseaux, notamment liées à l’appartenance nationale, aux opinions politiques et au positionnement de chacune dans le milieu littéraire. Outre les divisions sociales et politiques, cette thèse illustre la difficulté éprouvée par les auteures à arrimer leurs intérêts individuels (promotion de leur propre carrière, identités multiples interférant avec l’appartenance de sexe/genre) aux intérêts collectifs (légitimer l’autorat féminin). Ainsi, les écrivaines reconnaissent l’importance de la communauté des femmes auteures, tout en étant confrontées au défi d’en maintenir la cohésion, à une époque où non seulement l’activité littéraire, mais également le contexte culturel et politique, sont en pleine transformation. This thesis documents, catalogues, and analyses relationships between female authors in France and Italy, and between French women and Italian women, from 1770 to 1840. It results from a study of the correspondence and published works of twelve women authors (Anne-Marie de Beaufort d’Hautpoul, Sophie Gay, Félicité de Genlis, Marie-Émilie de Montanclos, Constance Pipelet Salm, Germaine de Staël, Teresa Bandettini, Elisabetta Caminer, Carolina Lattanzi, Diodata Saluzzo, Fortunata Sulgher Fantastici, and Isabella Teotochi Albrizzi) over the course of a period marked by important developments in print culture, the significant involvement of women in the querelle des femmes, and the increased presence of women authors. These transformations, together with the international political upheaval caused by the French Revolution, saw attacks on female authorship pursued with increased vigour. The relationships between women authors within such a context illustrate the challenges faced in implementing a “common action” aimed at defending a female cause (that of female authors) before the advent of the feminist movement.
Often described as either “rivals” or “sisters”, this study demonstrates that the nature of relationships between women in this period was in fact far more complex. On the one hand, the community of female authors examined was marked by a certain degree of cohesion. These writers had wide-ranging networks of contacts, and could rely on each other for support in times of crisis. They constructed female literary genealogies and deconstructed the discourse used by others in reference to their community, particularly that relating to the “exceptionality” of and “rivalry” between women authors. On the other hand, significant differences also ran across the membership of these networks, notably in terms of nationality, political opinions, and the position each woman occupied within literary circles. Over and above these social and political divisions, this thesis illustrates the difficulties women faced in reconciling their individual interests (the advancement of their own careers, the divisive impact of their multiple identities with the cohesion of their sex/gender) with those of the collective (legitimizing female authorship). In short, this study examines the ways in which female authors recognized the importance of their community and faced the challenges of maintaining its cohesion, at a time when not only literary activity, but also the political and cultural context in which it was framed, were undergoing great transformation.
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