Université de Montréal

Le sourcier de l'Éden : l'esthétique de l'idylle dans l'oeuvre romanesque de Jean Giraudoux

par

Christian B. Allègre

Département d'études françaises

Faculté des arts et des sciences

Thèse présentée à la Faculté des études supérieures en vue de l'obtention du grade de Philosophiæ Doctor (Ph.D.) en études françaises

mai 1998

© Christian Allègre, 1998


Sommaire

      Des Provinciales (1909) à La folle de Chaillot (1945), l'oeuvre de Jean Giraudoux est traversée de part en part par une réflexion sur la condition humaine dont on n'a pas assez souligné l'originalité et la cohérence. Elle a pourtant sa place dans une époque où les écrivains se sont souciés de représenter un monde inquiet et en rapide changement et s'interrogent sur le destin de l'homme; mais tandis que la plupart ont choisi, dans les années 20-30, de décrire des consciences déchirées ou l'engagement d'individus, sont attirés par les questions sociales et le militantisme, et vont jusqu'à la prédication, Giraudoux propose une révolution du regard et se donne la mission de lutter contre la laideur et la dégradation de la vie par la poésie. Il est possible d'échapper à la vision désespérée de l'existence en changeant d'angle de vue, de porter le poids du monde en adoptant le regard poétique. Cet idéal aussi fragile à tenir que difficile à atteindre réside dans la synthèse de la poésie et de la prose et c'est le métier de l'écrivain que d'en trouver le langage : «je suis le sourcier de l'Éden», a-t-il déclaré. Il a payé cher cette positivité et cette originalité. On a ignoré la force critique et la profondeur métaphysique de son oeuvre, surtout après la guerre où l'on n'a plus vu en lui qu'un magicien du langage et de l'image.

      C'est dans son théâtre que ses idées se sont exprimées sous leur forme la plus critique et la plus philosophiquement articulée. Mais l'esthétique qui s'y déploie s'était constituée bien avant dans son oeuvre narrative qui demeure méconnue et trop peu étudiée. Notre étude a pour but de montrer le lien chez Giraudoux entre la « mission » du Sourcier de l'Éden et les choix stylistiques et génériques du romancier. Pour comprendre le roman giralducien, il faut se débarrasser de la visée dix-neuvièmiste du roman réaliste, se dégager de l'hégémonie qu'exerce la conception sartrienne de la littérature, et se placer dans la perspective du Roman romantique allemand et du Symbolisme.

      La thèse examine comment, à partir du modèle des idylles de Théocrite et de la poétique romantique allemande, Giraudoux élabore une esthétique du «sublime provincial» dont la stratégie est la poétisation de la prose, et la forme le roman-poème ou idylle, surtout dans les oeuvres narratives d'avant la période dramatique sur lesquelles la thèse se concentre pour montrer qu'elles constituent un exemple particulièrement remarquable du tournant politique de l'esthétique au XXe siècle.


Remerciements

      À mon directeur, Robert Melançon. Un travail aussi longtemps en gestation accumule les dettes, mais à Robert Melançon va une reconnaissance particulière. Par sa gentille ténacité, sa confiance inébranlable, sa compréhension inespérée de mon projet, sa délicatesse et son humour, il a été l'accoucheur de cette thèse.

      Sans l'aide financière du Conseil de Recherches en Sciences Humaines du Canada (CRSH), qui m'a octroyé une bourse de doctorat, ce travail n'aurait pu être mené à bien. Que les professeurs qui avaient recommandé ma candidature soient remerciés : Lise Gauvin, Serge Proulx, Michel Pierssens. Je remercie la F.E.S. dont j'ai reçu l'aide financière, et le département d'études françaises, institution qui m'a encouragé de toutes les manières et m'a fourni l'occasion d'enseigner et d'organiser les premiers pas du département dans l'Internet. À messieurs Bernard Beugnot, Robert Melançon et Michel Pierssens, les directeurs sous lesquels j'ai travaillé, va toute ma reconnaissance.

      À l'équipe des giralduciens de l'université de Tours, pour leur si chaleureuse réception en 1994 : MM. Jacques Body, Guy Teissier et Brett Dawson. À M. le Proviseur Gervais Rutard, pour son accueil au lycée Jean Giraudoux de Châteauroux, doté depuis 1994, grâce à lui, d'un magnifique musée où les chercheurs peuvent travailler. À M. Jean-Pierre Giraudoux pour son accueil à Versailles, et sa permission de publier les travaux d'étudiant de son père. Au Dr Jean Giraudoux et à Mme Armand, neveu et nièce de Giraudoux, pour leur si amical et si généreux accueil. À Daniel Béguin, de la cellule d'informatique littéraire à l'ENS, pour quelques vérifications à la Bibliothèque de l'École.

      Que ce projet ait survécu à travers deuils, accidents de la circulation, difficultés financières et catastrophes informatiques tient du miracle. Je le dois au dévouement et à l'endurance de mes proches et de mes amis. Je leur suis infiniment reconnaissant pour leurs sauvetages (en tous genres). Que David, que Françoise sachent que du fond du coeur je leur dis : sans vous cela n'aurait pas été possible. Un affectueux merci va à ma chère Gaby. À Paulette, à Rolf, merci pour leur compréhension et leur gentillesse attentive. Que tous soient affectueusement remerciés pour leur aide et leur intérêt pendant toutes ces années.

      


      À mes maîtres K.S. et A.S.

      

      À Marie-Thérèse, l'inspiratrice
in memoriam


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