« L’impérialisme », le piège de la gauche en Iran : l e cadre discursif de la Gauche Radicale à travers l’analyse de discours des journaux (2006-2008)

Abstract

Ce mémoire explore le mouvement étudiant de la Gauche Radicale en Iran en tant que mouvement social, à travers l’analyse de discours. Il examine la mise en sommeil du mouvement et a pour objectif de dévoiler comment la Gauche Radicale module ses cadres discursifs et son identité collective dans le cadre d’un régime autoritaire. Il vise à cerner les éléments favorisant la mobilisation des étudiants et des groupes qu’elle désire rallier (les travailleurs et les femmes). Une mise en perspective, à partir de la lutte passée des gauches iraniennes contre les régimes autoritaires, révèle les effets du répertoire d’action collective et du répertoire discursif de ces mouvements. Elle permet aussi de remettre en cause l’innovation dans leur répertoire, 30 ans après la révolution de 1979, et d’identifier les moyens mis en œuvre pour concrétiser les demandes socioéconomiques des Iraniens. L’analyse du discours de la Gauche Radicale révèle une absence conjuguée d’innovation dans son répertoire discursif, de liens culturels ainsi que d’éléments de demandes concrètes des Iraniens. À partir de l’analyse de 27 articles produits et diffusés entre 2006 et 2008, l’analyse montre comment la Gauche Radicale emprunte des éléments de son répertoire hérité sans innovation pour la construction de son identité collective et de ses stratégies discursives (« l’égalité et la liberté » et « la lutte contre l’impérialisme »). Elle permet de constater que la Gauche Radicale les construit loin de la culture et de la mentalité sociétale et manque les demandes concrètes des Iraniens en conflit quotidien avec le régime autoritaire. La lutte, conçue comme étant principalement dirigée contre le régime politique, apparaît en fait comme étant contre les réformistes et les libéraux dans son discours. La dynamique de cette lutte discursive est, en effet, étouffée à cause d’une prise de position proche des médias dominants. Dans ce contexte, les revendications raisonnables de la Gauche Radicale, censée avoir la capacité de mobiliser les gens, sont vidées de leur potentiel mobilisateur. En l’absence de résonance de leurs cadres discursifs, le discours qui en découle est ainsi neutralisé dans sa tentative de rallier les gens ordinaires de cette société et est ignoré par eux.

This thesis uses discourse analysis to explore the Radical Left student movement in Iran as a social movement. It examines how this movement fell into dormancy and its aim is to reveal how the Radical Left modulated its discursive frames and its collective identity in the context of an authoritarian regime. It aims at identifying the elements that encouraged the mobilization of students and the groups with which it wanted to ally (workers and women). Comparison with the past struggle of the Iranian left against authoritarian regimes reveals the effects of the collective-action and discourse repertoire of these movements. This also makes it possible to call into question whether there was innovation in the repertoire thirty years after the 1979 revolution, and to identify the means used in support of the socioeconomic demands of Iranians. Discourse analysis of the Radical Left reveals a joint absence of innovation in its discursive strategies, cultural links, as well as the elements of the concrete demands by Iranians. Through analysis of twenty-seven articles published and distributed between 2006 and 2008, the analysis shows how the Radical Left used its inherited repertoire without innovation to construct its collective identity and its discursive strategies (“Freedom and Equality” and “Struggle against Imperialism”). On this basis it is concluded that the Radical Left constructed them in isolation from the culture and the social mentality and neglected the concrete demands of Iranians who were in daily conflict with the authoritarian regime. Although the struggle was conceived as directed mainly against the political regime, it is shown to have been in fact directed discursively against reformists and liberals. Indeed, the dynamism of this struggle, because it took a position close to that of the dominant media, was weakened. In this respect, the reasonable demands of the Radical Left, which supposedly had the capacity to mobilize the people, were emptied of their mobilizing potential. Thus, in the absence of any resonance in their discursive frames, the resulting discourse was rendered ineffective in its attempt to rally the ordinary people of the society and was ignored by them.