Abstract(s)
L’œuvre artistique du cinéaste thaïlandais Apichatpong Weerasethakul est au cœur de ce projet. Ce dernier, fruit d’une longue réflexion alliant cinéma et société, s’interroge sur la façon dont l’œuvre de Weerasethakul prend part à une certaine résistance par différentes formes de détour et par l’expression de la diversité. Le cinéaste développe ainsi un récit qui serpente, se démultiplie, qui cherche à représenter la complexité d’un monde où le réel et l’imaginaire s’entremêlent. Un récit qui s’oppose à la suprématie de l’unique ligne droite, c’est-à-dire de la norme imposée. Six forces de résistance structurent et divisent cette recherche : la résistance par la représentation d’une temporalité multiple, la mise en scène des dominés à l’écran, la puissance animiste du cinéma, la force de résistance du désir, le symptôme et le rêve comme résistance par le détour, et le pouvoir de métamorphose. Ce mémoire pose les questions suivantes : dans le cas d’injustices et de traumatismes, est-ce que le cinéma et l’art audio-visuel peuvent aider à élaborer un discours constructif sur le passé refoulé ? Comment le cinéma peut-il contrer la répression mémorielle et mettre en scène un récit alternatif face à un récit historique manipulé et contrôlé ? Par le traitement du réel et de l’imaginaire, le cinéma de Weerasethakul est à la fois un intermédiaire qui permet la résurgence de la mémoire collective et personnelle refoulée, luttant ainsi contre leur possible disparition, et à la fois une force sensible à l’altérité et à la pluralité dont est composé le monde.
The work of the Thai film director and artist Apichatpong Weerasethakul is at the heart of this project. The latter developed through a long reflection on the relationship between cinema and society. The main question asked is: in what way can Weerasethakul’s work be said to take part in a kind of resistance, through various forms of detours, as well as through the expression of diversity? His narratives meander, multiply, seek to represent the complexity of a world that combines the real with the imaginary, narratives that contradict the supremacy of the one and only straight line, that is, of the enforced norm. Six resistance forces structure and divide this research: resistance through representation of a multiple temporality, on-screen presentation of dominated characters, the animist potency of cinema, the resistance force intrinsic to desire, symptoms and dreams as forms of resistance via a detour, and the power of metamorphosis. This Master’s thesis asks the following subsidiary questions: when injustices and traumas have been experienced, can cinema, and other visual and performative art forms, help develop a constructive way of thinking about the repressed past? How can cinema overcome the repression of memory and present an alternative narrative, when the official one is manipulated and controlled? Through its intertwining of the real and the imaginary, Weerasethakul’s work acts both as a mediator enabling the resurgence of collective and personal repressed memory, thus fighting against its possible disappearance, and as a force sensitive to the alterity and plurality that constitute the world.