Lex Electronica

Revue électronique du Centre de recherche en droit public

Rôle et travaux au sein de l’Union européenne et de l’Allemagne en matière de la protection des consommateurs en Commerce Électronique

Mathias ZADRAZIL (*)

Lex Electronica, vol. 7, n°1, Été / Summer 2001

<http://www.lex-electronica.org/articles/v7-1/Zadrazil.htm>



Synopsis

This article delivers a brief overview of the new European and German legislation concerning electronic commerce and consumer protection. It describes the evolution of electronic commerce, and the relevant legislation and jurisprudence within the last few years.

A distinction is established between European and German levels. The new Directive on electronic commerce was adopted on June 8th 2000, and must be transposed into national law before January 17th 2002. It will be described and briefly analyzed before we turn our attention to the new German law which focuses on distance contracts, which has just recently been adopted by the German Parliament in order to respect the 1997 Directive concerning such contracts. The judicial framework that existed before the new law on distance contracts came into force will also be exposed, while taking into consideration consumers’ protection.

As the European Union creates a new Directive on electronic commerce, its member states are still busy transforming the 1997 Directive into national law. In comparing European and German laws, we will therefore underline the weakness of European legislation: the time needed to establish an effective and functional judicial framework can easily stretch out over many years.

The article will conclude with a short presentation of « powershopping » or « community shopping », which seems to be destined to become a new model for European consumers, and yet has been the object of restrictive decisions in recent days.

Résumé

Cet article délivre un bref aperçu de la nouvelle législation européenne et allemande relative au commerce électronique et à la protection des consommateurs. Il décrit le développement du commerce électronique, de la législation et de la jurisprudence au cours des dernières années.

Une distinction est établie entre les niveaux européen et allemand. La nouvelle Directive sur le commerce électronique a été adoptée le 8 juin 2000 et doit être transposée dans la loi nationale avant le 17 janvier 2002. Elle sera décrite et succinctement analysée avant d’aborder la nouvelle loi allemande portant sur les contrats à distance qui vient d’être adoptée par le Parlement allemand pour transposer la Directive sur les contrats à distance de 1997. Le cadre juridique existant avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les contrats à distance sera également exposée en tenant compte de la protection des consommateurs.

Alors que l’Union européenne vient de créer une nouvelle Directive sur le commerce électronique, les États membres sont encore occupés à transformer celle de 1997 en loi nationale. En comparant la législation européenne et allemande, nous soulignerons donc le point faible de la législation européenne : le temps nécessaire pour établir un cadre juridique efficace et fonctionnel peut facilement atteindre plusieurs années.

L’article s’achèvera sur une courte présentation du « powershopping » ou « community shopping », en passe de devenir un nouveau modèle pour le consommateur européen, qui a fait l’objet de décisions restrictives ces derniers temps.


Table des Matières

Introduction

I. L’évolution du commerce électronique en Europe et en Allemagne

1. L’historique du commerce électronique et sa législation

2. Quelques statistiques et quelques chiffres

II. La directive sur le commerce électronique de l'Union Européenne

1. La législation avant la Directive

2. Le contenue de la Directive sur le commerce électronique

a. La portée de la Directive

b. L’obligation d’information

c. La responsabilité des fournisseurs

d. Les codes de conduite

e. Les restrictions étatiques et la protection juridique

3. Les principaux changements

a. Les codes de conduite

b. L’exclusion de la responsabilité des fournisseurs

4. Résultat intermédiaire

III. La législation en Allemagne

1. La législation et la protection du consommateur avant la Directive sur le commerce électronique et la Loi sur les contrats à distance

a. La Loi sur les conditions générales

b. La Loi sur la repente du démarchage à domicile

c. La Directive sur les contrats à distance 97/7 du 20 mai 1997

d. La Loi sur la protection des Consommateurs

e. La jurisprudence

2. La transformation de la Directive sur les contrats à distance et la nouvelle loi nationale

a. La phase de la transformation

b. La nouvelle législation

b.1. Introduction générale à la loi sur les contrats à distance

b.2. Les règlements de la loi sur les contrats à distance 

b.3. Autres dispositions récentes protégeant les consommateurs

3. Un cas particulier : « Powershopping »

Conclusion


Introduction

1. Le commerce électronique est une nouvelle façon d'envisager le commerce tant national qu'international. Certes, à l'heure actuelle, il ne représente qu'une faible part du total des opérations de vente au détail. Cependant, le marché du commerce électronique connaît une croissance extrêmement rapide et pourrait représenter 1400 milliards de dollars d’ici 2003.

2. En Europe, le commerce électronique se chiffre déjà à 17 milliards d’Euros et devrait atteindre 340 milliards d’Euros en 2003[1]. Étant donné que le commerce électronique devient de plus en plus important pour la vie économique, la Communauté européenne et les États membres se sont mis d’accord sur un cadre juridique pour ce nouveau domaine il y a quelques années.

3. Selon l'Union européenne, le commerce électronique, fondé sur le traitement électronique et la transmission de données, couvre des activités très diverses, qui vont du commerce de biens et services à la livraison en ligne d'informations numériques, en passant par les transferts électroniques de fonds, les activités boursières et les marchés publics[2]. Il y a lieu d’appréhender brièvement les démarches prises par l’Union européenne et de décrire la nouvelle législation en Allemagne visant en particulier la protection des consommateurs.

4. Dans ce travail une partition sera établie entre le niveau de l’Union européenne et le niveau de l’Allemagne. La nouvelle Directive sur le commerce électronique qui a été adoptée le 8 juin 2000 et qui doit être transformée en loi nationale avant le 17 janvier 2002, est la Directive la plus récente de la Commission européenne traitant du commerce à distance. Elle sera décrite et succinctement évaluée dans la première partie du travail.

5. Dans un deuxième temps, la nouvelle Loi sur les contrats à distance qui remonte à la Directive sur les contrats à distance de 1997 et qui vient d’être adoptée par le Parlement allemand, sera également décrite. De plus, le cadre juridique et la juridiction avant l’entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur les contrats à distance seront exposés.

6. En comparant les législations européenne et allemande, il est facile de mettre en évidence les étapes de l'élaboration d’une réglementation. Alors que l’Union européenne vient de créer une nouvelle Directive sur le commerce électronique, les États membres sont encore occupés à transformer celle de 1997 en loi nationale. Cela démontre clairement le point faible de la législation européenne : le temps nécessaire pour établir un cadre juridique efficace et fonctionnel peut facilement atteindre plusieurs années.

I. L’évolution du commerce électronique en Europe et en Allemagne 

1. L’historique du commerce électronique et sa législation

7. Alors que le commerce sur les réseaux électroniques s’est développé à partir des années quatre-vingt-dix, l’Union européenne a tardé à se rendre compte qu’il fallait réagir au niveau législatif. Les chiffres d’affaires avaient déjà dépassé quelques millions d’Euros quand la Communauté a fait les premières démarches pour légiférer sur ce nouveau domaine.

8. L’Union européenne s’est également aperçue que le développement du commerce électronique dans le domaine de l’information offre des opportunités importantes dans la Communauté, en particulier dans les petites et les moyennes entreprises[3].

9. La Directive sur les contrats à distance fut adoptée en 1997. Elle ne comportait que quelques dispositions spéciales pour les réseaux électroniques[4]. C’est pour quoi une autre Directive traitant du commerce en ligne devrait être adoptée. Le projet d’une directive sur le commerce électronique prit forme en 1998 lorsque la Commission européenne s’attacha à élaborer un cadre juridique. Elle a présenté une proposition de directive visant la mise en place d'un cadre juridique cohérent pour le développement du commerce électronique dans le marché unique. Après plusieurs modifications et divergences, le Parlement européen a voté en faveur de la directive le 4 mai 2000, conformément à la procédure de codécision définie par l’article 251 du Traité CE. La directive est fondée sur le traité instituant la Communauté européenne, notamment sur les articles 47 II, 55 et article 95 du Traité CE.

10. Selon les objectifs formulés dans les dossiers préparatoires de la Directive sur le commerce électronique, le cadre réglementaire de l’Union européenne devrait garantir la sécurité des données et le respect de la confidentialité en recourant à des procédés de cryptage. De plus il doit assurer une protection appropriée des droits de la propriété intellectuelle et des services à accès conditionnel et garantir la clarté et la neutralité de l'environnement fiscal. En outre, la Communauté envisageait de susciter l'intérêt et de gagner la confiance des consommateurs en encourageant l'utilisation de labels de qualité et de codes de conduites tant en améliorant la transparence des transactions.

2. Quelques statistiques et quelques chiffres

11. Les études sur le commerce électronique en Europe divergent énormément. Selon une enquête de l’organisation conseil PricewaterhouseCoopers, l’Allemagne mène dans le domaine du développement du commerce électronique en Europe[5]. L’enquête montre que la plupart des entreprises européennes, qui travaillent dans le domaine de l’Internet et qui ont une cotation en bourse, résident en Allemagne. De plus 45% de l’ensemble du marché des capitaux en Allemagne appartiennent à ces entreprises; bien plus que dans les autres pays membres de la Communauté européenne.

12. D’après une autre étude du ministère britannique du Commerce et de l’Industrie, le Royaume-Uni figure dans le groupe de tête du commerce électronique à égalité avec les États-Unis et le Canada, devant l’Allemagne et la Suède.

13. Quelque 27% des échanges commerciaux effectués au Royaume-Uni se réalisent par voie électronique ; soit une part plus importante qu’en Allemagne, en France ou en Suède. L’étude montre aussi que 81% des entreprises britanniques ont actuellement accès à Internet, contre 63% en 1999. Elles sont 83% aux États-Unis et 80% en Allemagne. En outre 55% des entreprises de moins de 10 salariés ont accès à l’Internet, contre 15% l’an dernier ; elles sont 61% aux États-Unis et 65% en Allemagne[6]. L’exactitude de ces enquêtes n’est pas primordiale, car les chiffres indiquent clairement l’importante croissance du commerce électronique à l’intérieur de l’Union européenne.

II. La directive sur le commerce électronique de l’Union européenne

1. La législation avant la Directive

14. Avant que la Directive sur le commerce électronique ne soit élaborée, il existait la Directive sur les contrats à distance et quelques autres Directives concernant ce domaine. Cependant, le cadre juridique pour le commerce électronique en particulier n’était pas assez élaboré pour garantir une protection du consommateur suffisante et pour offrir une certaine sécurité judiciaire dans les États membres.

15. Au niveau national la législation était divisée en plusieurs lois et ordonnances administratives protégeant les consommateurs. De plus, il s’étend une juridiction étendue non seulement aux États membres mais également au niveau européen par la Cour de Justice européenne.

2. Le contenue de la Directive sur le commerce électronique

a. La portée de la Directive

16. La directive a pour objet d’assurer à un niveau élevé l’intégration juridique communautaire afin d’établir un réel espace sans frontières intérieures pour les services de la société de l’information et assurer la libre circulation des services électroniques entre les Etats membres[7].

17. Par contre, la Directive ne porte pas préjudice quant à la protection des individus existant notamment en matière de protection de la santé publique et des intérêts des consommateurs établis par les institutions communautaires. La directive couvre tous les services qui sont offerts sur les réseaux, c’est-à-dire le commerce électronique mais aussi les services fournis gratuitement aux utilisateurs sur les sites Internet. Elle est valable pour les arrangements entre les entreprises (« B to B ») et pour les arrangements entre les offrants et les consommateurs (« B to C »).

18. Parmi les principaux services couverts par la directive il y a lieu de mentionner : les bases de données, les services financiers, les journaux électroniques, les services de professions réglementées en ligne, la vidéo sur demande, le marketing et la publicité directe. Par contre, la directive n’est pas applicable à d’autres secteurs tels que la fiscalité ou les activités de jeux de hasard, y compris les loteries et les transactions portant sur des paris.

b. L’obligation d’information

19. La Directive contient une multitude d’obligations et d’informations pour les commerçants. Selon les Articles 5, 6 et 10 de la Directive, les États membres doivent veiller à ce que les prestataires de service rendent possible pour leurs clients et pour les autorités compétentes un accès facile et direct aux informations de base concernant leurs activités (nom, adresse, adresse de courrier électronique, numéro d’immatriculation au registre du commerce, numéro de TVA, etc.).

20. De plus, les communications commerciales doivent être clairement identifiables comme telles, c’est-à-dire que, sur Internet, les pages Web qui font la promotion de produits doivent indiquer qu’il s’agit d’un message publicitaire. En outre, les États membres doivent également prendre des mesures visant à garantir que les prestataires qui envoient par courrier électronique des communications commerciales non-sollicitées consultent régulièrement les registres « opt-out » dans lesquelles les personnes qui ne souhaitent pas recevoir ce type de communication peuvent s’inscrire[8].

21. Toutes ces obligations demandent beaucoup de prudence, car les abus peuvent être sanctionnés par les États membres ou les consommateurs peuvent révoquer le contrat conclu avec les commerçants et même demander des dommages intérêt en intentant des actions civiles.

c. La responsabilité des fournisseurs

22. Selon les articles 12, 13, et article 14 de la Directive, les fournisseurs d’infrastructures et d’accès sont exclus de toute responsabilité à condition que le prestataire ne soit pas à l’origine de la transmission, qu’il ne sélectionne pas le destinataire et qu’il ne choisisse pas, ni ne modifie les informations faisant l’objet de la transmission. Ils doivent tout simplement assurer le « simple transport » des informations. Les mêmes obligations sont prévues pour les fournisseurs de service de « caching » et pour le « hosting ».

d. Les codes de conduite

23. L’article 16 de la Directive prévoit que les États membres doivent encourager l’élaboration de codes de conduite entre les associations ou organisations d’entreprises, professionnelles ou de consommateurs. De plus, les codes de comportement devraient être accessibles par voie électronique dans les langues communautaires pour que chaque consommateur et chaque offrant puissent s’informer. Ces codes de conduite devraient être communiqués à la Commission et aux États membres pour assurer un même niveau d’information pour les États et la Communauté. Les codes sont sensés permettre l’amélioration de la protection des mineurs et du respect de la dignité humaine.

e. Les restrictions étatiques et la protection juridique

24. Les États membres peuvent restreindre les libertés sur le marché du commerce électronique si plusieurs conditions sont remplies comme, par exemple, si l’ordre public est en péril, s’il y a un danger pour la santé ou la sécurité publique, y compris la protection de la sécurité et la défense nationale. De même, si la protection des consommateurs, y compris des investisseurs, requiert une intervention étatique immédiate. En outre, les États membres détermineront, selon l’article 20 de la Directive, le régime des sanctions applicable aux violations des dispositions nationales et prendront toutes les mesures nécessaires afin d’assurer leur mise en œuvre.

25. Ces restrictions et la compétence à établir des sanctions permettent aux États de faire valoir leur propre idée du déroulement du commerce électronique. C’est-à-dire que les États membres ont gardé une grande liberté d’action et de contrôle.

26. De plus, les États membres doivent assurer la sécurité juridique. En d’autres termes, il importe de noter que les États doivent, selon l’article 17 de la Directive, encourager le développement d’organes de règlement extrajudiciaire, y compris des moyens électroniques appropriés pour résoudre les différends apparus en ligne. En outre, les États sont obligés de fournir un système de recours judiciaire qui garantit l’adoption de mesures rapides pour prévenir toute nouvelle atteinte aux intérêts concernés (Article 18).

3. Les principaux changements

27. Deux changements principaux sont apparus lors de l’adaptation de la Directive au commerce électronique. Il s’agit de deux nouvelles approches de réglementation que la Communauté européenne a connue récemment.

a. Les codes de conduite

28. Un changement principal instauré par la directive est le fait que la Communauté européenne essaie d’encourager le développement de codes de conduite individuels parmi les commerçants et les fournisseurs. Favoriser les codes de conduite constitue un moyen récent permettant d’augmenter la responsabilité des participants du commerce de l’Union européenne. Auparavant, la Communauté réglait le cadre juridique en ne laissant que de faibles responsabilités aux entreprises et aux consommateurs. Maintenant la Communauté tend à lentement favoriser une autorégulation; un système de contrôle tout à fait nouveau pour la Communauté européenne. Une tendance vers l’autorégulation est également présente dans la proposition de Directive envisageant un cadre réglementaire commun pour les réseaux et les services de communication électronique qui était adopté au mois d’août 2000[9]. Il reste à vérifier le niveau d’autorégulation que la Communauté va établir dans sa législation. Étant donné que les marchés de communication sont difficiles à régler, cette approche semble être la plus appropriée.

b. L’exclusion de la responsabilité des fournisseurs

29. Comme décrit ci-dessus, la responsabilité des fournisseurs d’hébergement et d’accès est très limitée. Après des années d’incertitude cette réglementation va permettre de résoudre une vieille divergence entre les États membres. Afin d’éviter une aggravation des divergences législatives et jurisprudentielles, l’Union européenne a réglé cette question dans la Directive. Certains États membres avaient toujours tendance à responsabiliser les fournisseurs ou les moteurs de recherche pour le contenu de leurs serveurs ou pour les informations et les liens fournis à l’internaute. Deux cas récents sont l’affaire CompuServe en Allemagne[10] et l’affaire Lacoste en France.

30. Même si la nouvelle législation sur les responsabilités permet d’en finir avec les divergences entre les États membres, quelques questions demeurent. La Directive ne précise pas à partir de quand et selon quelles modalités un fournisseur est censé avoir une connaissance suffisante de l’existence d’activités illicites sur son serveur. De plus, la Directive ne précise pas les sanctions que les États membres peuvent ordonner si un fournisseur ne suit pas ses obligations. Cela pourrait de nouveau causer des différences jurisprudentielles entre les États membres.

4. Résultat intermédiaire

31. La nouvelle Directive et les Lois nationales qui seront établies bientôt vont renforcer la position des consommateurs partout dans l’Union européenne. La Directive ne présente pas de surprise cependant quelques nouvelles approches proposées, favorisant une autorégulation, sont remarquables. Cette tendance est très importante, car les réseaux électroniques et le commerce qui s’y déroule ne peuvent être réglementés d’une manière aussi sévère et détaillés que dans d’autres secteurs. La mondialisation oblige à établir des règles plus flexibles. Bien que l’Union européenne soit en faveur d’une régulation étatique, les démarches mises en place récemment indiquent un changement mais sans exclure la protection des consommateurs.

32. En ce qui concerne la responsabilité des fournisseurs, la Communauté doit encore compléter la législation pour éviter des vides juridiques et la présentation de cas devant la Cour de Justice européenne.

III. La législation en Allemagne

1. La législation et la protection du consommateur avant la Directive sur le commerce électronique et la Loi sur les contrats à distance

33. Selon de nouvelles enquêtes, autour de 8 millions d’habitants sont branchés à Internet en Allemagne. La moitié d’entre eux utilisent ce moyen de communication chaque jour. Ainsi Internet devient de plus en plus un outil de communication pour le grand public.

34. La communication et les opérations commerciales entre les consommateurs et les commerçants doivent se dérouler sans problèmes tel est la condition essentielle pour que le domaine du commerce électronique se concrétise. Dans le même temps la législation de la protection du consommateur joue un rôle important pour établir un équilibre entre les parties contractuelles.

35. Avant que la nouvelle Loi sur les contrats à distance rentre en vigueur, les règlements les plus importants étaient la loi sur les Conditions Générales (Gesetz zur Regelung des Rechts der Allgemeinen Geschäftsbedingungen, AGBG), la Loi sur la repente du démarchage à domicile et la Directive européenne sur les contrats à distance 97/7 (Fernabsatzrichtlinie), et la loi sur la Protection des Consommateurs (Verbraucherkreditgesetz, VerbrKrG)[11].

a. La Loi sur les conditions générales (Gesetz zur Regelung des Rechts der allgemeinen Geschaeftsbedingungen, AGBG)

36. La Loi sur les conditions générales s’applique aux opérations d’affaires avec des consommateurs allemands si les conditions générales du contrat sont formulées en avance. Cela signifie pour l’offrant qu’il peut se servir des conditions générales dans des contrats pour des opérations au niveau du commerce électronique. Le consommateur est par conséquent protégé par les clauses de la Loi sur les conditions générales comme pour les arrangements « sur papier », en particulier contre l’utilisation de clauses de contrat abusives. La loi est donc applicable sans réserve et n’a pas besoin d’être adaptée au commerce électronique.

b. La Loi sur la repente du démarchage à domicile (Haustür-Widerrufsgesetz, HaWiG)

37. La Loi sur la repente du démarchage à domicile n’est par contre pas applicable lors des arrangements contractuels électroniques. Cette loi protège le consommateur contre les offres d’achats imprévus comme par exemple à la porte d’entrée d’une maison privée, sur le lieu du travail, dans les transports publics ou lors du temps libre. La loi n’est pas applicable pour les achats effectués sur Internet parce que le consommateur a lui-même cherché la page Web avec les offres. Ainsi il n’était pas pris à l’improviste lorsqu’il a signé le contrat en ligne. Même si les offres se trouvent dans des petites fenêtres sur les pages Web d’information ou même si l’offrant utilise les « Pop ups » la Loi sur la repente reste inapplicable.

38. La Cour Suprême allemande a jugé dans une décision de 1996 que même la publicité par téléphone ne peut pas être classée sous la Loi sur la repente, donc d’autant moins la publicité sur Internet. Le consommateur ne se sent pas forcé de conclure un contrat parce qu’il peut tout simplement changer de page Web. Il manque la pression subtile d’un vendeur et les consommateurs peuvent vérifier les offres sans être soumis à une quelconque influence.

c. La Directive sur les contrats à distance 97/7 du 20 mai 1997 (Fernabsatzrichtlinie)

39. La Directive sur les contrats à distance (Directive 97/7) du 20 mai 1997 était la législation antérieure au cadre juridique qui est entré en vigueur récemment et de plus elle constitue le fondement juridique de la nouvelle loi sur les contrats à distance. Cette directive règle la protection des consommateurs lors des conclusions de contrats à distance qui sont conclu à l’aide des moyens de communication. Entre autres elle s’intéresse à tous les contrats sur la livraison des biens et des services de la vie quotidienne. Avant l’entrée en vigueur de la nouvelle législation allemande cette Directive servait de référence aux jugements des tribunaux allemands. Étant donné le fait que le contenu de la Directive ressemble à la nouvelle loi sur les contrats à distance sa description ne sera pas exposée.

d. La Loi sur la protection des Consommateurs (Verbraucherkreditgesetz, VerbrKrG)

40. De plus, il faut mentionner la loi sur la Protection des Consommateurs, elle prévoit également un droit de révocation pour certains contrats, comme les abonnements pour les journaux et les magazines, les ouvrages en plusieurs tomes de livre et ceux prévoyant une livraison en plusieurs envois. Cette loi est présentement un obstacle pour le commerce électronique, car elle exige des déclarations sur papier et surtout la confirmation du consommateur d’avoir été informé par l’offrant de son droit de révocation. Cette déclaration sur papier ne peut être réalisée ni sur les réseaux électroniques ni par téléphone. Il faut donc une modification ou un complément qui donne la même valeur aux signatures électroniques du consommateur. Une loi autorisant les signatures électroniques vient justement d’être votée par le Parlement allemand au début du mois de septembre 2000.

e. La jurisprudence

41. Pour pallier aux manques de la législation il importe de mentionner l’existence d’une jurisprudence détaillée et consolidée au cours des années en Allemagne. S’agissant de la relation entre le consommateur et les offrants, celle-ci favorise les commerçants en négligeant parfois les besoins des consommateurs:

42. Selon un jugement du tribunal de grande instance de Munich I [12] il ne faut pas nécessairement considérer la filiale allemande d’un fournisseur d’accès à Internet comme un partenaire contractuel. Lors de l’audience dans le cas « CompuServe », la Cour de grande instance a déclaré que le partenaire contractuel est toujours la société mère, dans le cas présent, CompuServe Inc. aux États-Unis.

43. Le tribunal de grande instance de Bad Kreuznach[13] a déclaré dans un autre jugement qu’il faut supposer en faveur des fournisseurs d’accès à Internet que leurs factures sont exactes. Dans le cas « T-Online » la cour indiquait que les consommateurs doivent prouver l’inexactitude des factures ou que le raccordement technique était utilisé d’une manière abusive par quelqu’un d’autre. Ce jugement démontre clairement la tendance des cours allemandes à favoriser la position des commerçants.

44. Il existe des jugements semblables à celui du tribunal de grande instance de Ravensburg et de la Cour d’appel de Cologne[14] dans d’autres cours. Les deux tribunaux ont déclaré que le consommateur doit lui-même assurer les accès aux réseaux électroniques qu’il utilise. Si les mesures de sécurité ne suffisent pas à respecter les normes, c’est le consommateur qui doit prendre à sa charge les coûts d’amélioration et des éventuels dommages causés par le manque de sécurité du système de communication.

45. En conclusion il faut constater que les tribunaux ont pris en considération les risques encourus par les des offrants d’accès à Internet, de biens et de services sur les réseaux[15]. Par contre, le nouveau cadre juridique prêtant beaucoup plus d’attention à la protection des consommateurs, les tribunaux doivent également plus tenir compte de leurs besoins. Dans les prochaines années, un changement dans la juridiction des cours devra se préciser. De plus, les offrants et les fournisseurs doivent beaucoup plus respecter les nouvelles règles protégeant le consommateur et cela pourrait peut-être diminuer le travail pour des tribunaux.

2. La transformation de la Directive sur les contrats à distance et la nouvelle loi nationale

a. La phase de la transformation

46. La Directive est désormais définitivement adoptée par les instances européennes depuis 1997. Le Parlement allemand (Bundestag) et l’Assemblée des « Länder » (Bundesrat) ont également voté en faveur de la nouvelle loi sur les contrats à distance (Fernabsatzgesetz, FernAbsG). Sur certains points, le législateur allemand s’est servi de son droit de modifier quelques passages avant de transformer la Directive en loi nationale[16].

47. Les Etats membres disposaient d’une période de dix-huit mois pour l’adaptation (date limite 5.06.2000). Au début, il existait seulement une esquisse de la loi sur les contrats à distance mise au point par des conseillers du gouvernement. Finalement, au mois de janvier 2000, le gouvernement a adopté le projet de loi et l’a transmis à l’Assemblée des « Länder » le 7 février 2000. La Loi est finalement entrée en vigueur le 30 juin 2000, quelques semaines après la date limite prévue dans la Directive.

b. La nouvelle législation

b.1. Introduction générale à la loi sur les contrats à distance (Fernabsatzgesetz)

48. Le nouveau cadre juridique allemand de la Loi sur les contrats à distance a plusieurs conséquences juridiques et pratiques pour les offrants et pour les consommateurs.

49. Lors de l’entrée en vigueur de la nouvelle législation, pratiquement aucune offre sur les réseaux électroniques ne correspondait aux directives de la Loi sur les contrats à distance. Par conséquent, les offrants furent obligés de modifier leurs pages Web et leurs offres. Les commerçants qui envisagent de se lancer dans le commerce électronique doivent prendre en considération la nouvelle législation afin d’éviter des modifications dispendieuses et onéreuses de leurs pages.

50. Les offrants de commerce électronique ne doivent pas oublier que le consommateur possède, selon le nouveau cadre juridique, un droit de révocation des contrats signés en ligne. Par conséquent, certaines révocations sont possibles et l’offrant est obligé d’en tenir compte dans ses prévisions budgétaires. Cela pourra causer des frais supplémentaires dans tout le secteur.

51. Si les offres en ligne ne sont pas conformes aux règles de la nouvelle loi sur les contrats à distance, les commerçants doivent s’attendre à des rappels à l’ordre payants par des concurrents ou des associations de protection des consommateurs. Donc, l’adaptation des offres dans le délai imparti constitue un objectif essentiel pour les offrants pour réussir leur commerce.

52. Selon la nouvelle loi, le consommateur court dorénavant beaucoup moins de risques lors d’un achat en ligne. Le nouveau droit de révocation lui offre en pratique la possibilité de « l’achat sur échantillon ». De plus, le consommateur profite de l’obligation législative sur l’information et de celle d’apporter aux actes de commerce la diligence d’un commerçant consciencieux.

53. Malheureusement pour les consommateurs, le législateur n’a pas profité de l’occasion pour associer la négligence des diligences requises par la pratique commerciale avec les dommages intérêts. Par conséquent, le consommateur ne peut pas exiger des dommages intérêts basés directement sur la nouvelle loi. Le consommateur peut néanmoins présenter un recours à l’aide du Code Civil Allemand. Il reste à savoir si les offrants obéiront de leur propre initiative aux règles imposées par la loi, ou si les concurrents les y forceront à l’aide des règlements du droit à la concurrence[17]. La législation de la Directive sur le commerce électronique qui entrera en vigueur au mois de janvier 2002 apportera peut-être de nouvelles réponses.

b.2. Les règlements de la loi sur les contrats à distance

54. La Loi sur les contrats à distance s’applique sur les contrats sur la livraison des biens et des prestations de service uniquement négociés et signés à l’aide de moyens de communication électroniques comme, par exemple, Internet. La loi est seulement valable pour les conclusions de contrats entre les entreprises et les consommateurs. Ainsi, elle ne s’applique pas pour les contrats entre deux entreprises ou entre deux consommateurs.

55. Toutefois, la nouvelle loi n’est pas applicable à certains secteurs ou certains domaines. D’après Article 1 Paragraphe 3 FernAbsG, les commerces bancaires et autres commerces financiers en sont exclus parce que l’Union européenne travaille présentement sur une autre directive qui réglera ces secteurs. L’enseignement à distance, le commerce immobilier et plusieurs marchandises concernant des besoins quotidiens sont également exclus.

56. Enfin la loi n’est pas valable si une autre loi en vigueur prévoit une réglementation encore plus favorable au consommateur. Au premier plan se trouve donc la protection des consommateurs, c’est-à-dire la loi peut être subsidiaire dans certains cas.

57. La loi sur la vente à distance oblige le commerçant à informer le consommateur (Article 2 FernAbsG) d’une manière approfondie et complète. Lorsque les préparatifs du contrat ont lieu au téléphone, l’offrant doit informer le consommateur au début (!) de la conversation de la raison commerciale de l’appel et en plus il doit notifier immédiatement l’identité de l’entreprise.

58. Avant que les négociations sur la conclusion du contrat ne commencent, le commerçant doit, dépendant du moyen de communication choisi, informer le consommateur le plus clairement possible sur l’entreprise, le nom du propriétaire et les représentants. De plus, il doit fournir une adresse valable pour des recours juridiques.

59. Le commerçant doit expliquer clairement et d’une manière approfondie le prix, les frais accessoires éventuels et les conditions du contrat. Il est obligé de fournir ces informations une deuxième fois, au plus tard lors de la livraison de la marchandise sur un support de données durable, par exemple par courrier électronique ou sur papier.

60. Le droit de révocation du consommateur doit être clairement mis en évidence par le commerçant. De plus, il doit l’informer sur les conséquences juridiques du droit de révocation, il doit fournir une adresse valable si le consommateur veut utiliser sa responsabilité du commerçant pour la garantie des vices matériels et les services après vente. Pour les contrats qui sont élaborés et valables à long terme, l’offrant doit expliquer les possibilités de résiliation.

61. Le contrat entre en vigueur après un délai de 14 jours lorsque le consommateur ne s’est pas servi de son droit de révocation.

62. Le délai commence à compter à partir du moment que le commerçant a fourni les informations requises sur un support durable. S’il s’agit de livraisons de marchandises, le délai ne débute pas qu’à partir de la date de livraison des biens.

63. Indépendamment des conditions mentionnées ci-dessus, le droit de révocation expire au plus tard trois mois après la livraison ou trois mois après la conclusion du contrat lorsqu’il s’agit d’un service. Le droit expire si l’offrant accomplit la livraison ou le service avec l’accord du consommateur.

64. Par contre le droit de révocation n’est pas valable pour tous les types de contrats conclus entre un commerçant et un consommateur. Les contrats sur la livraison de logiciels, de supports audio et vidéo font exception si le consommateur les a déjà utilisés. De plus les contrats sur la livraison des journaux et des magazines et des marchandises périssables sont également exclus de la nouvelle loi sur les contrats à distance.

65. Les accords différentiels entre les parties contractuelles qui négligent les intérêts des consommateurs, ne sont pas valables selon l’article 5 FernAbsG.

66. La loi est uniquement applicable aux contrats qui ont été conclu après le 1er juin 2000. Les prospectus de vente qui ne contiennent pas les informations prévues dans la nouvelle loi peuvent encore être utilisés jusqu’au 31 décembre 2000 s’ils ont été édités avant le 31 août 2000.

b.3. Autres dispositions récentes protégeant les consommateurs

67. Récemment le législateur allemand a adopté plusieurs compléments au Code Civil Allemand (Bürgerliches Gesetzbuch, BGB) visant l’amélioration de la protection du consommateur. Malgré la nouvelle loi sur les contrats à distance et certains autres compléments, le BGB n’était, dans certains cas, plus approprié pour protéger le consommateur dans le domaine du commerce électronique.

68. En fait, le BGB couvrait encore le commerce entre les commerçants et les consommateurs directement. Dans certains cas, cette ancienne législation causait quelques problèmes au niveau du droit acquis et causait des incertitudes parmi les parties contractuelles.

69. Selon le nouvel Article 661a BGB, les commerçants n’ont plus le droit de faire de fausses promesses de gain. Si le commerçant envoie, dans des buts publicitaires, un message au consommateur en donnant l’impression que celui-ci a gagné lors d’un concours, le commerçant doit tenir ses engagements. Comme cette pratique commerciale est apparue de plus en plus souvent, le législateur fut obligé d’agir pour protéger les intérêts des consommateurs.

70. En outre, le nouvel Article 676h BGB protège contre l’abus des cartes de crédit sur Internet. Beaucoup de consommateurs refusent d’utiliser des cartes de crédit comme mode de paiement sur les réseaux électroniques craignant que la sécurité ne soit pas encore assez grande. Par contre, selon la législation du BGB, seul le commerçant porte le risque du paiement s’il l’accepte sans utilisation du NIP et sans présentation de la carte de crédit. Le consommateur peut même refuser de le dédommager.

71. Dans certains cas les commerçants envoient des produits aux consommateurs sans sommation espérant que le consommateur acceptera le contrat proposé. Le nouvel Article 241a BGB précise qu’aucun contrat n’est conclue lors que le consommateur reçoit des biens sans en avoir fait la demande. De plus dans certains cas l’offrant n’a même plus le droit de reprendre les biens. Cette règle protège le consommateur contre une nouvelle forme de publicité et contre les offres agressives et subtiles.

72. Bien que la législation ait beaucoup changé en faveur du consommateur en Allemagne, un certain nombre de problèmes subsistent. La difficulté majeure réside dans l’imposition formelle des droits matériels. Souvent les partenaires contractuels siègent à l’étranger et cela pose une multitude de problèmes pour le plaignant. Les coûts d’une exécution par contrainte peuvent facilement dépasser la valeur des biens et des services demandés.

73. Ils restent encore plusieurs améliorations à apporter surtout au niveau de l’imposition des droits, c’est-à-dire au niveau bilatéral entre les pays et au niveau communautaire. 

3. Un cas particulier : « Powershopping »

74. Depuis environ deux ans une nouvelle forme de consommation en groupe est apparue en Europe. Le « community-shopping » ou « Powershopping » est basé sur l’idée de réunir les demandes des consommateurs pour obtenir un meilleur prix lors de l’achat effectué en ligne pour toutes les personnes impliquées. Le prix final d’un produit se déduit du nombre de consommateurs impliqués. Les consommateurs doivent faire des offres d’achats fermes et si un certain nombre d’intéressés se regroupent, le contrat est conclu avec les commerçants. Les intéressés peuvent se faire enregistrer pour un certain prix et la conclusion du contrat se réalise pour eux seulement pour ce prix[18]. Ainsi, les consommateurs peuvent obtenir pour les produits de marque des réductions d’environ 25%. Les pages Web qui offrent un tel service sont par exemple « www.powershopping.de » ou « www.letsbuyit.com ».

75. Ces regroupements de consommateurs sur Internet ont récemment du faire face au soupçon des tribunaux allemands. Les jugements étaient plutôt restrictifs et il y a lieu de s’interroger si les tribunaux allemands ont mal interprété les règles du Droit de la Concurrence et Antitrust ainsi que de la Loi sur les rabais de commerce.

76. La Cour d’Appel de Hambourg et le Tribunal de grande Instance de Cologne ont décrété que le fournisseur d'accès à Internet « Primus-Online » n’a plus le droit d’offrir le « community-shopping » sur la page Web « www.powershopping.de » parce que les tribunaux y voyaient un abus à la Loi sur les rabais de commerce.

77. Plusieurs fabricants de marchandises se sont plaints des regroupements de « community-shopping ». Ils ont déclaré que ces pratiques commerciales causaient un danger pour le commerce de détail en Allemagne et que cela pourrait provoquer une baisse des chiffres d’affaires pour les fabricants.

78. La Cour d’Appel[19] a décidé que les échelonnements de prix représentaient un rabais interdit. Elle a déclaré que les échelonnements de prix étaient seulement autorisés selon la Loi sur les rabais si celui-ci est conforme aux usages du commerce. Etant donné le fait que le « powershopping » ne soit pas encore une coutume commerciale, les rabais ne sont pas autorisés.

79. Cet argument surprend puisque, le commerce électronique n’existant que depuis peu, le développement d’une coutume commerciale n’est pas encore possible. De plus, la Loi sur les rabais n’est pas sensée empêcher le développement de nouvelles coutumes commerciales. Il est reconnu dans la jurisprudence qu’une pratique de vente peut être une coutume commerciale.

80. Les juges du tribunal de grande Instance de Cologne[20] ont déclaré que le « powershopping » encourage la maladie du jeu parce que le premier but du consommateur n’est plus l’achat lui-même, mais la négociation du prix.

81.   Ceci démontre que les tribunaux allemands prêtent aux consommateurs allemands une faiblesse dans leur faculté de jugement. Par opposition, la Cour de Justice européenne a déclaré récemment que le consommateur européen est « prudent et raisonnable ».

82. Il reste donc à attendre de voir si les jugements des deux tribunaux passeront devant la Cour Suprême Fédérale allemande ou même devant la Cour de Justice européenne. La protection des consommateurs est certainement une tâche importante pour le législateur et les tribunaux. Par contre, le législateur et les tribunaux doivent être prudents pour que l’Allemagne ne soit pas dépassée par les autres nations dans le milieu du commerce électronique. De plus, il ne faut pas négliger le fait que le commerce électronique est une forme de commerce très récente qui a besoin du temps pour se développer et s’établir. Il faut le surveiller, mais pas l’étouffer.  

Conclusion

83. Depuis l’adaptation de la Directive européenne sur le commerce électronique et surtout depuis l’adaptation de la Loi sur les contrats à distance en Allemagne, la protection des consommateurs a connu une énorme amélioration. Etant donné le fait que le commerce électronique devient de plus en plus important dans notre société, un cadre juridique efficace et moderne visant la protection des consommateurs est indispensable.

84. La législation européenne et la législation allemande ont fait les premières démarches dans cette direction mais comme le cadre juridique est encore incomplet dans certains domaines, surtout dans celui des services financiers et des jeux en ligne, il reste encore beaucoup de travail juridique aux législateurs au niveau national et au niveau international pour garantir une protection complète aux consommateurs. Par contre, les législateurs ne devraient pas oublier les soucis et les incertitudes des commerçants. Étant donné le fait que le commerce électronique est également un nouveau terrain d’activité pour les offrants, il est important de respecter les besoins des commerçants et de ne pas empêcher un développement économique favorable qui est indispensable pour les économies nationales partout dans la Communauté européenne.

85. A long terme un cadre juridique équilibré doit être le but du législateur et des tribunaux au niveau de l’Union européenne et en Allemagne. La Directive sur le commerce électronique de la Communauté européenne et la Loi sur les contrats à distance en Allemagne sont un début réussit pour tous les protagonistes. Il reste à connaître l’impact qu’aura la transformation de la Directive sur le commerce électronique en loi national par les autorités des Etats membres d’ici un an.



Notes

(*) Doctorant à l’Université de Lausanne au Centre du Droit Comparé et Européen, étudiant à la Maîtrise Droit des Technologies de l’Information, Université de Montréal (Canada - Qc). Email : Mathias.Zadrazil@etu.unil.ch

[1] Verbiest, Thibault, « La Directive européenne sur le commerce électronique », Juriscom.net, 15 juin 2000, <www.juriscom.net/espace2/2/ce0615.htm>

[2] Commission européenne, « Directive sur le commerce électronique », Bruxelles 2000, p.3.

[3] Commission européenne, « Directive sur le commerce électronique », Bruxelles 2000, p.2.

[4] Commission européenne, « Directive sur les contrats à distance », Bruxelles 1997, p.4.

[5] PricewaterhouseCoopers, « Neue PwC-Studie: PricewaterhouseCoopers Internet 150 », <http://212.184.106.144/30000_publikationen/meldung.asp?id=14>

[6] Yahoo! Actualités, « Le Royaume-Uni dans le groupe de tête pour le commerce électronique », 10 octobre 2000, <http://fr.news.yahoo.com/001010/1/ojqw.htm>

[7] Commission européenne, « Directive sur le commerce électronique », Bruxelles 2000, p.4.

[8] Verbiest, Thibault, « La Directive européenne sur le commerce électronique », Juriscom.net, 15 juin 2000, <www.juriscom.net/espace2/2/ce0615.htm>

[9] Commission européenne, « Proposition de Directive sur un cadre réglementaire commun pour les réseaux et les services de communication électronique », <www.europa.eu.int/eur-lex/fr/com/dat/2000/fr_500PC0393.html>

[10] TGI Munich I, numéro du jugement : 70 3625/98, Netlaw.de, <http://www.netlaw.de/urteile/lgm_14.htm>

[11] Freitag, Andreas, « Verbraucherschutz im e-commerce », NET-Investor, édition octobre 1998, <http://www.bender-zahn-tigges.de/deutsch/onlinerecht/verbr.html>

[12] TGI Munich I, 19 septembre 1996, numéro de dossier 21 O 5002/96, Netlaw.de, <http://www.netlaw.de/urteile/lgm_1.htm>

[13] TGI Bad Kreuznach, 30 juillet 1996, numéro de dossier 1 S 82/96.

[14] TGI Ravensburg, 13 juin 1991, numéro de dossier 2 S 6/91; CA Cologne, 30 avril 1993, numéro de dossier 19 U 134/92.

[15] Ackermann, Stefan, « E-commerce: wer regelt was », <http://www.dr-ackermann.de/ecommerce/folgerungen.htm>

[16] Ackermann, Stefan, « Die neue Rechtslage nach dem 5 Juni 2000 », <http://www.dr-ackermann.de/ecommerce/recht-neu.htm>

[17] Ernst, Stefan, « E-commerce wird geregelt », <http://www.legamedia.de/leg…an/2000/00-07/0007_ernst_fernabsatz.php>

[18] Rinne, Alexander, « Gerichte ziehen neuen Formen des E-Commerce enge Grenzen », <http://www.bender-zahn-tigges.de/kartellrecht/e-commerce.htm>

[19] CA Hambourg, 18 novembre 1999, numéro de dossier 3 U 230/99, Jurpc.de, <http://www.jurpc.de/rechtspr/20000100.htm>

[20] TGI Cologne, 25 novembre 1999, numéro de dossier 31 O 990/99, Netlaw.de, <http://www.netlaw.de/urteile/olghh_5.htm>

 

 

 

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