Université de Montréal
par
Anne Charbonneau
Département de médecine sociale et préventive
Faculté de médecine
Thèse présentée à la Faculté des études supérieures
en vue de l'obtention du grade de
Philosophiae Doctor (Ph.D.)
en santé publique option promotion de la santé
juin, 1998
© Anne Charbonneau, 1998
Problème : De nombreuses pathologies des muqueuses buccales et du parodonte sont associées à l'infection au VIH. Il est donc primordial que les personnes vivant avec le VIH-SIDA aient accès aux services d'un dentiste. Or au Québec, des témoignages non documentés indiquent que certaines d'entre elles se sont vues refuser des services après avoir divulgué leur état de séropositivité au dentiste.
Objectifs : Cette recherche visait à répondre aux questions de recherche suivantes :
Méthodologie : Une enquête anonyme à l'aide d'un questionnaire auto-administré a été menée au Québec, de 1993 à 1995, auprès de 463 personnes vivant avec le VIH-SIDA recrutées à partir de plusieurs sources. Parmi les répondants, 50 % avaient des symptômes du SIDA.
Résultats : Plus de 80 % des répondants ont rapporté avoir consulté un dentiste depuis le diagnostic de leur infection au VIH. De ceux-ci, 54 % ont rapporté avoir toujours divulgué leur séropositivité au dentiste, alors que 24 % ont rapporté ne l'avoir jamais divulguée au dentiste. Les raisons que ces derniers donnaient pour ne pas divulguer leur état au dentiste incluaient l'obligation des dentistes d'utiliser les précautions universelles quel que soit le statut de séropositivité du patient, la crainte d'un bris de confidentialité, la peur d'être refusé ou mal jugé par le dentiste. Toutefois, 83 % des répondants préféraient que le dentiste soit au courant de leur séropositivité.
Plus du quart des répondants ayant divulgué leur séropositivité au dentiste se sont vus refuser des soins buccodentaires. Par ailleurs, 2/3 de ceux-ci n'auraient pas été référés à un autre dentiste. Le refus est associé chez les répondants à l'utilisation de drogues injectables et chez les dentistes au sexe féminin et à la pratique privée.
Les répondants ayant consulté un dentiste depuis le diagnostic de leur séropositivité ont reçu principalement des soins buccodentaires de base. En outre, 60 % des répondants ont indiqué qu'ils préféraient recevoir leurs soins dans une clinique dentaire régulière. Ce choix était justifié principalement par le souci de ne pas être discriminés. Ceux qui préféraient aller dans une clinique spécialisée se sont aussi montrés soucieux de la discrimination en plus de vouloir des soins adaptés à leur condition de santé.
Conclusions : Les résultats de l'étude suggèrent qu'au Québec les personnes vivant avec le VIH-SIDA font face à des problèmes d'accessibilité aux services buccodentaires. Des efforts supplémentaires devraient être faits pour faciliter à cette clientèle l'accès sans discrimination des services buccodentaires dans les cliniques régulières. Les personnes vivant avec le VIH-SIDA pourraient ainsi se sentir moins réticentes à divulguer leur état de santé au dentiste et plus confiantes de recevoir des services de qualité adaptés à leur condition de santé.
Dédicace
à Jean Buist
et à Carl, Thomas, Jean-Pierre, Karen, Paul, John, Peter, Roger et tous les autres.
« L'expérience ne donne jamais à ses jugements
une universalité véritable et rigoureuse,
mais seulement supposée et comparative... »
Emmanuel Kant (1724-1804)
Critique de la raison pure.
« Je vois personne sur la route », dit Alice.
« Comme je voudrais avoir d'aussi bons yeux », remarqua le Roi d'un ton amer. « Voir Personne! Et à cette distance encore!
Moi, tout ce que je suis capable de voir sous cette lumière, c'est des gens! »
Lewis Carroll
Alice au pays des merveilles.
« La plus grande qualité d'un travail est d'être terminé »
Source inconnue
J'aimerais tout d'abord remercier très sincèrement les personnes vivant avec le VIH-SIDA qui ont généreusement accepté de collaborer à cette étude, soit en m'aidant à créer le questionnaire ou en participant à l'enquête. Plusieurs sont disparues depuis et la lutte n'est pas terminée, mais sachez que je continue à mettre toute mon énergie à l'atteinte de mon objectif, faire cesser la discrimination entourant l'infection au VIH.
Je tiens aussi à remercier de leur chaleureuse collaboration les responsables des associations, maisons d'hébergement, cliniques médicales et hôpitaux qui m'ont aidé dans la réalisation de cette enquête.
Mes remerciements vont aussi au Programme national de recherche et de développement en matière de santé (PNRDS) qui, par son aide financière, a rendu possible la réalisation de ce projet de recherche et la poursuite de mes études de maîtrise et de doctorat dans le cadre du programme de bourses de formation en recherche
Mes deux directeurs Brigitte Maheux et François Béland méritent plus que mes remerciements, mais aussi mon admiration et ma reconnaissance. J'ai reçu avec eux une formation «sur mesure » empreinte de générosité. Plus que des directeurs, ils ont été mes « entraîneurs » de doctorat partageant mes succès, mes bonheurs et mes angoisses. J'espère leur faire honneur et, surtout, avoir à nouveau l'occasion de travailler et d'échanger avec eux.
Mes années d'études à la maîtrise et au doctorat ont été parmi les plus belles années de ma vie et les plus riches en stimulations intellectuelles. Et c'est à tous les professeurs qui ont patiemment et passionnément partagé leur savoir, de même qu'à mes collègues-étudiants aux champs d'intérêt tous plus passionnants les uns que les autres, que je le dois. À vous tous, merci.
À mes collègues de la Faculté de médecine dentaire, et en particulier aux Drs Jean Turgeon, Gilles Lavigne, Daniel Kandelman, Arto Demirjian et Monique Michaud, j'aimerais vous remercier de m'avoir fait confiance, de m'avoir appuyé et de m'avoir facilité la poursuite de mon doctorat. Un merci tout particulier à Richard Tanguay pour son appui indéfectible et ses dépannages en tout genre.
J'aimerais redire à mes amis et à ma famille comme je les aime et comme il a été difficile de refuser si souvent les propositions alléchantes de bons soupers et de sorties diverses. Et comme je suis heureuse que vous soyez toujours là.
Et à mon amour, je n'ai rien à ajouter, puisque tu as tout vécu auprès de moi.
Anne Charbonneau