Abstract(s)
Le contexte social dans lequel s’inscrivent le désir d’enfant et la procréation en Occident s’est profondément transformé au cours des dernières décennies. Après l’introduction de la contraception et l’augmentation du nombre d’enfants nés hors mariage, le développement des nouvelles techniques reproductives et de l’adoption, notamment l’adoption internationale, ont à leur tour contribué à la transformation des cadres dans lesquels s’inscrivent les relations de parenté et la formation des familles.
À partir de l’étude de témoignages de couples québécois dont les échecs successifs en procréation médicalement assistée (PMA) ont mené à la décision d’adopter, cette thèse interroge les multiples dimensions qu’implique un tel type de trajectoire. Sur le plan social, tant la procréation médicalement assistée que l’adoption nécessitent l’intervention d’une tierce partie pour concrétiser et faire reconnaître l’établissement du lien filiatif, soit la médecine dans le cas de la PMA et celle des autorités juridiques et gouvernementales dans le cas de l’adoption. Les deux phénomènes mettent également en scène des situations et des enjeux hautement révélateurs des valeurs et des représentations collectives en matière de parenté et de famille. D’un premier abord, le type de parcours étudié semble illustrer le passage entre deux sphères complètement distinctes: celle de la nature et du biologique incarnée par la PMA et celle de la culture et du lien social incarnée par l’adoption. Or, l’étude des trajectoires des participants donne à voir une situation beaucoup plus complexe où s’entremêlent un ensemble d’explications et de facteurs relatifs au désir d’enfant, à la famille, à la parentalité qui ne font sens qu’une fois replacés dans le contexte des grandes tendances sociales et idéologiques qui traversent notre société. Plus globalement, les analyses proposées dans cette thèse participent au développement d’une anthropologie de la parenté qui tienne compte des dynamiques et des tensions qui touchent la famille moderne.
The social context surrounding reproduction and the desire for children in the West has undergone a profound transformation in recent decades. Following the introduction of contraception and the increase in the number of children born out of wedlock, the development of new reproductive technologies and adoption, particularly international adoption, has in turn contributed to transforming the frameworks surrounding kinship and the formation of families.
Based on the testimonials of Québec couples whose successive failures in medically assisted procreation (MAP) have led them to the decision to adopt, this thesis examines the multiple dimensions involved in this type of trajectory. Socially, both AR and adoption require the intervention of a third party to establish and legitimize filiation: the medical profession in the case of AR, and legal and government authorities in the case of adoption. Both phenomena also put into play situations and issues that are highly revealing of values and collective representations regarding kinship and the family. At first glance, the type of path studied seems to illustrate a transition between two completely separate spheres: that of nature and biology embodied by AR, and that of culture and social relations embodied by adoption. However, the study of the participants’ trajectories reveals a much more complex situation in which a set of explanations and factors related to the desire for children, the family, and parenthood intertwine and make sense only when viewed in the context of the major social and ideological trends that our society is undergoing. More generally, the analyses proposed in this thesis contribute to the development of an anthropology of kinship that accounts for the dynamics and tensions that affect the modern family.