Abstract(s)
Au début du XIXe siècle, le paysage socio-politique européen est dominé par les bouleversements en provenance de France. Réagissant à ceux-ci, l’empereur Franz I restreint les libertés individuelles des sujets du Saint Empire Romain, tandis qu’au sein de l’aristocratie se trouvent au contraire des adeptes de l’Aufklärung, défenseurs de liberté et de tolérance.
C’est dans ce contexte que Beethoven compose sa troisième symphonie en 1803-1804. Solomon (2004) a démontré que le compositeur a fréquenté sa vie durant des adhérents aux principes de l’Aufklärung, dont plusieurs francs-maçons. Des symboles maçonniques de sa main ornent d’ailleurs une page d’esquisses pour l’Eroica (Lockwood, 2013). Il semble donc naturel d’explorer cette œuvre sous cet angle. Une analyse formelle de l’Allegro con brio, la première selon la méthode de Caplin (1998), permet de faire ressortir une récurrence marquée du chiffre 3 à travers plusieurs paramètres (tonalité, métrique, rythme, forme, instrumentation). De plus, les trois étapes du rite initiatique (mort, enterrement et résurrection) sont représentées dans les trois premiers mouvements, tandis qu’on retrouve dans les trois derniers mouvements des évocations de la devise française Liberté, Égalité, Fraternité
Cette relecture sous l’angle d’une interprétation maçonnique d’une œuvre fondamentale du canon symphonique apporte une contribution inédite à l’historiographie sur Beethoven ainsi qu’à l’histoire de la pensée et des sociétés.
At the beginning of the 19th century, the changes coming from France dominate the European sociopolitical landscape. In reaction to these, Franz I restricts individual freedom of the subjects of the Holy Roman Empire, while within the aristocracy, the numbers of adepts of the Aufklärung movement and believers in freedom and tolerance are growing.
It is in this context that Beethoven composes his Third Symphony in 1803-104. Solomon (2004) has demonstrated that his whole life, the composer was surrounded with members of the Aufklärung, many of them also freemasons. Masonic symbols in Beethoven’s hand are even to be found on a page of his sketchbook for the Eroica (Lockwood, 2013). Therefore, it only seems logical to analyse the symphony from the angle of a masonic interpretation. A formal analysis of the first movement according to Caplin’s method (1998), the first of its kind to be applied to a whole movement from a Beethoven symphony, brings to the fore a marked recurrence of the number three throughout numerous parameters (tonality, measure, rhythm, form, instrumentation). Furthermore, all three steps of the masonic initiation rite (death, burial and resurrection) are represented in the first three movements, whereas one also finds references to the French motto of Liberté, Égalité, Fraternité in the last three.
This new reading of a fundamental work of the symphonic canon represents a novel contribution to the historiography of Beethoven.