«Hacker» la constitution : la démarche constituante comme expérience de traduction de la culture Internet dans la grammaire politique islandaise
Thèse ou mémoire
2019-04 (octroi du grade: 2019-10-30)
Auteur·e·s
Directeur·trice·s de recherche
Cycle d'études
MaîtriseProgramme
AnthropologieMots-clés
- Islande
- Constitution
- Constituante
- Crise financière de 2008
- Démocratie participative
- Démocratie numérique
- Culture Internet
- Culture hacker
- TIC
- Web 2.0
- Libéralisme
- Néolibéralisme
- Iceland
- Constitutional process
- 2008 global financial crisis
- Participatory democracy
- Digital democracy
- Internet culture
- Hacker culture
- ICT
- Liberalism
- Neoliberalism
- Anthropology - Cultural / Anthropologie - Culturelle (UMI : 0326)
Résumé·s
La grave crise économique qui a secoué l’Islande dans la foulée de la crise financière mondiale de 2008 a profondément et durablement ébranlé la confiance de la population islandaise envers ses représentants politiques et ses institutions. Dans le contexte de grogne populaire qui a suivi la crise, plusieurs initiatives impulsées par des groupes citoyens ont essaimé pour tenter de réaffirmer différentes formes de souveraineté populaire. Plusieurs de ces initiatives ont misé sur le potentiel participatif des technologies de l’information et de la communication (TIC), en particulier celles associées au Web participatif (ou Web 2.0) ; mais de toutes, c’est sans doute la démarche constituante participative qui a le plus retenu l’attention à l’échelle mondiale. Faisant appel à des concepts, pratiques et outils empruntés au Web 2.0 et au domaine du développement logiciel, cette démarche dont les travaux se sont tenus entre 2010 et 2011 a directement sollicité la participation de la population pour l’élaboration d’un nouveau texte constitutionnel censé corriger certains des déséquilibres politiques ayant mené à la crise de 2008. Inédite à plusieurs égards, cette démarche constitue un cas unique pour comprendre le rôle que peuvent jouer des acteurs associés à ce que Manuel Castells appelle la « culture Internet » dans la redéfinition des institutions politiques et des représentations imaginaires d’une nation. En investissant le champ politique dans le contexte post-crise, ces acteurs traduisent certaines conceptions du politique et de la société propres à la culture Internet (et en particulier à sa sous-culture hacker) dans une grammaire politique islandaise fortement marquée par le libéralisme et un imaginaire national postcolonial. L’analyse du discours de différents acteurs de cette démarche et du contexte dans lequel il est énoncé montre que ce travail de traduction puise à un fond commun : celui du vaste registre politique et philosophique du libéralisme. Un registre que les acteurs de la démarche issus de la sous-culture hacker cherchent en quelque sorte à « mettre à jour » afin d’en dépasser les limites, à un moment charnière de l’histoire de leur pays. The severe economic crisis that struck Iceland in the aftermath of the 2008 global financial crisis has profoundly and lastingly shaken the Icelandic population’s confidence in its political representatives and its institutions. In the context of popular unrest that followed the crisis, many citizen-led initiatives have sprung up to try to reaffirm different forms of popular sovereignty. Several of these initiatives have focused on the participatory potential of information and communication technologies (ICTs), particularly those associated with participatory web (or web 2.0); but of all, it is probably the participatory constitutional process that has attracted the most attention on a global scale. Drawing on concepts, practices and tools borrowed from the field of software and web 2.0 development, this constitutional process, which took place between 2010 and 2011, directly solicited the participation of the population for the drafting of a new constitution supposed to correct some of the political imbalances that led to the 2008 crisis. Unprecedented in many aspects, this process offers a unique case to understand the role that actors associated with what Manuel Castells calls the "Internet culture" can play in redefining political institutions and imaginary representations of a nation. By investing the political field in the post-crisis context, these actors tried to translate certain conceptions of politics and society specific to the Internet culture (and in particular its hacker subculture) into an Icelandic political grammar strongly marked by liberalism and a postcolonial national imaginary. The analysis of the discourse of different actors of this constituent process and of the context in which it was enunciated shows that this translation intent draws on a common background: that of the vast political and philosophical register of liberalism. A register that the actors from the hacker subculture seek to "update" in order to exceed its limits, at a pivotal moment in the history of their country.
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