La mémoire collective aux temps de la justice transitionnelle
Thèse ou mémoire
2016-12 (octroi du grade: 2017-03-28)
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Cette thèse de doctorat porte sur le processus de la mémoire collective dans le cadre
d’un pays en période de transition. Nous y développons une conception de la construction de
la mémoire collective et en particulier de son rôle pour la réussite de la transition vers une
démocratie stable et durable dans un pays en voie de transition. Plus précisément, notre
recherche porte sur les apports et bénéfices de la mémoire collective dans le contexte de la
justice transitionnelle (JT). Pour plusieurs pays, la JT a été la réponse adoptée en vue du
passage d’un conflit interne et/ou d’une dictature à l’institution d’une nouvelle démocratie,
c’est-à-dire un système basé sur le respect des droits de l’homme et de l’État de droit. Il s’agit
donc d’un processus complexe, qui se compose de plusieurs phases, mécanismes et catégories
d’action.
Fondamentalement, la JT vise à (re)construire une société suffisamment juste pour
garantir une certaine stabilité et suffisamment stable pour garantir une certaine justice. Deux
approches générales sont alors possibles pour mettre en place la JT et tenir compte de ses
nombreux défis : l’approche holiste (de Grieff) et celle que nous nommerons, faute de mieux,
« atomiste » (Elster). En général, ceux qui soutiennent la vision atomiste voient dans les divers
mécanismes de la JT des éléments séparés et indépendants les uns des autres, ce qui peut
conduire à prioriser hiérarchiquement certains mécanismes et à en rejeter parfois d’autres qui
semblent moins importants. Nous entendons plutôt défendre la thèse selon laquelle, puisque
les différents aspects de la transition sont toujours en relation les uns avec les autres, il vaut
mieux réfléchir quant à savoir comment combiner les éléments plutôt que les isoler.
Nous présentons en ce sens la mémoire collective comme étant le domaine où peut se
penser cette relation entre les diverses composantes de la JT. La question de la mémoire
collective a donc une double fonction dans cette thèse : elle est certes un élément parmi
d’autres de la justice transitionnelle, mais elle est également le cadre qui permet de penser les
interactions entre les différentes composantes de la JT. La question qui dirige nos réflexions
est donc : comment la mémoire collective peut-elle aider une société en devenir à régler ses
comptes avec son passé ? Deux alternatives se présentent dans la littérature sur cette question :
la stratégie du « forgive and forget », qui consiste essentiellement à oublier le passé et à
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repartir à zéro comme si rien n’était survenu, ou celle du « revealing is healing », qui consiste
à analyser toutes les responsabilités passées (individuelles et collectives), à reconnaître le rôle
des acteurs (victimes, coupables, profiteurs, neutres, etc.) et à travailler sur un passé encore
présent. This thesis focuses on the role of collective memory in transition countries. We aim to
provide a clear understanding of the construction of collective memory and its specific
function towards national identity in transition countries (especially Tunisia, Libya and South
Africa). The construction of collective memory seems to result in a more efficient and
sustainable political, social and economic transition. More specifically, our research focuses
on the benefits of collective memory in the context of transitional justice (TJ). For many
countries, TJ was the answer to ensure the transition from an internal conflict or a dictatorship
towards a new democracy, that is to say, a system based on respect of human rights and the
rule of law. TJ is therefore a complex process, which consists of several phases and
mechanisms of action.
From a broad perspective, TJ aims to build or rebuild a society and institutions that are
just enough to ensure stability and stable enough to ensure justice. Two general approaches are
possible to establish TJ while gauging its many challenges: the holistic approach (De Grieff)
and an approach that we will call, for lack of a better term, "atomistic" (Elster). In general,
those who support the atomistic conception of TJ see in the various mechanisms of TJ distinct
and independent elements, which can lead to prioritize certain mechanisms over others and
sometimes reject those who seem less important. Since the different aspects of transition are in
relationship with each other, we intend to defend that it is better to think about the how to
combine the elements, rather than how to isolate them.
Hence, we present collective memory as the way by which the different components of
TJ can effectively be related and integrated to one another. The question of collective memory
therefore has a dual role in this project: at first we will describe it as one of the elements of TJ,
but it will also turn out to be the sphere where the different mechanisms of TJ interact. Our
question therefore is: how can collective memory help a society to come to terms with its past?
Two alternatives are presented in the literature on this question: the strategy of "forgive and
forget", which consists in forgetting the past and starting from scratch as if nothing happened,
and that of "revealing is healing," which consists in determining all past responsibilities
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(individual and collective), recognizing the role of everyone (victims, perpetrators,
opportunists, etc.) and work on a past that is still present.
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