Nietzsche, la pulsion, l’histoire
Thesis or Dissertation
Abstract(s)
Cette étude vise à comprendre le rôle de l’histoire dans la philosophie de Nietzsche et à faire ressortir son lien étroit avec l’articulation du corps vivant comme fil conducteur philosophique. Notre objectif principal est de montrer comment cette philosophie aphoristique a su maintenir les préoccupations historiographiques de jeunesse en permutant leur sens à l’aune de la pulsionnalité interprétative du corps. Prenant notre départ des considérations critiques écrites lors de son professorat à Bâle, nous démontrons que le sens historique se manifeste alors comme une sensibilité historique déterminée par une saisie intuitive, mais existentiellement difficile, du passé. Nous procédons ensuite à décrire comment le renouveau philosophique de sa période intermédiaire peut être vu comme une réduction pathologique de l’histoire de la métaphysique qui emprunte ses éléments critiques au scepticisme de Michel de Montaigne, à l’évolutionnisme naissant et au développement du néo-kantisme. Cette réduction, qui ramène l’expression des valeurs morales et métaphysiques au corps vécu (Leib). Par sa déconstruction de la subjectivité au profit d’une réalité pulsionnelle primordiale, mais irréductible, nous démontrons ensuite comment Nietzsche a su réinterpréter l’hérédité biologique comme une mémoire physiologique incorporée dont l’expression première est la reconduction de la notion d’espèce à celle de type. Enfin, par un retour à la sensibilité historique et notre analyse du phénomène historique en tant que tel, nous proposons de comprendre l’articulation ultime de la philosophie nietzschéenne comme une philosophie historique qui ne cherche pas à comprendre ou à expliquer le devenir, mais en opérer la synthèse par le truchement de « l’instant décisif ». This study aims to understand the role played by history in Friedrich Nietzsche’s philosophy and its underappreciated relation to the introduction of the body (Leib) as its philosophical red-thread. Our main goal is to show how his philosophy was able to preserve the historiographical interests on his early period by transforming history’s importance in accordance with the body’s constitutive forces. Starting with his critical discussion of history during his professorship in Basel, we demonstrate how he understood the historical sense as a form of historical sensibility determined by an intuitive yet existentially demanding grasp of the past. We then describe the philosophical renewal of his middle period as a reduction of the history of metaphysics to pathological states that owes much to Michel de Montaigne’s skepticism, nascent evolutionary biology and the burgeoning neo-Kantian movement. By bringing moral and metaphysical values to determinate bodily states, Nietzsche introduces the body as philosophically significant. By a careful reading of contemporary science and its influence on Nietzsche’s thinking, we show how the deconstruction of human subjectivity into its primordial physiological existence culminates in a reinterpretation of biological heredity as a form of incarnate memory, which reduces the concept of biological species to that of morphological types. Finally, we return to our initial discussion of our historical sensibility in order to demonstrate how Nietzsche’s philosophy is through and through historical and seeks not to understand Becoming but to decisively synthesise and decide our historical destiny.
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