Le blues et le jazz au service de la révolution? : les positions des communistes américains blancs à l’égard de la musique noire et son utilisation à des fins d’agit-prop durant l’entre-deux-guerres (1919-1941)
Thèse ou mémoire
Résumé·s
En 1936, l’American Music League publiait le recueil de chansons afro-américaines Negro Songs of Protest collectées par le folkloriste communiste Lawrence Gellert. Puis en 1938 et 1939, grâce au financement du mouvement communiste américain, le producteur John Hammond présentait deux concerts intitulés From Spirituals to Swing au Carnegie Hall de New York. En plus de rendre hommage à l’histoire de la musique noire américaine, ces deux concerts défiaient la ségrégation raciale, permettant au Noirs et aux Blancs d’être rassemblés sur une même scène et de s’asseoir ensemble dans l’assistance. Au même moment, la chanteuse jazz Billie Holiday faisait fureur au Café Society, premier club « intégré » de New York et lieu de rassemblement de la gauche radicale, en interprétant soir après soir la chanson ‘’Strange Fruit’’ qui dénonçait l’horreur du lynchage toujours en vigueur dans le Sud des États-Unis. C’était l’époque du Front Populaire, la plus importante période d’influence du mouvement communiste aux États-Unis et, de surcroît, le moment de l’histoire américaine durant lequel la gauche organisée détenait un pouvoir sans précédent sur la culture de masse.
Partant d’une discussion sur le potentiel révolutionnaire de la musique noire américaine et cherchant à comprendre le positionnement des mouvements sociaux vis-à-vis la culture, ce mémoire met en lumière le point de vue des communistes américains blancs face à l’émergence et à la popularité grandissante du blues et du jazz noirs aux États-Unis. En fonction des trois principales phases politiques du Parti Communiste américain (CPUSA) – la phase du colorblind class (1919-1928); la phase du nationalisme noir (1928-1935); le Front Populaire (1935-1940) – ce mémoire retrace les changements d’attitude de la vieille gauche envers la culture populaire et suggère que le mouvement communiste américain a tenté d’utiliser le blues et le jazz à des fins d’agit-prop. In 1936, the American Music League published Negro Songs of Protest, a book of songs collected by the left-wing folklorist Lawrence Gellert. In 1938 and 1939, with the financial support of the communist movement, the producer John Hammond was able to present From Spirituals to Swing at Carnegie Hall, New York, two concerts that celebrated the contribution of African American music in American history. Moreover, the From Spirituals to Swing concerts broke the color line, by letting Blacks and Whites play music together on stage and sit together in the audience. During the same years, jazz singer Billie Holiday enjoyed a monstrous success with her anti-lynching song “Strange Fruit” at Café Society, the first integrated club and radical left-wing cabaret in New York. It was the time of the Popular Front; a time when the communist movement had a great influence on American society and when the organized left exerted unprecedented power over mass culture.
Starting with a discussion of the revolutionary potential of African American music and trying to understand what social movements do with culture, this essay traces the developing point of view of white American communists toward the commercial explosion and growing popularity of blues and jazz music in USA during the interwar years. It asks the question of why there was so little mention of jazz and blues in Party organs during the 1920’s and early 1930’s , it explores the changing attitudes of the Old Left toward popular culture and suggests that the American communist movement used blues and jazz music for agitprop, during the last of the three main political phases of the Communist Party of America (CPUSA) – the colorblind class (1919-1928); the Black Belt Nation thesis (1928-1935); and the Popular Front (1935-1940).
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